vendredi 30 novembre 2012

L'histoire de l'art

L'histoire des hommes suinte d'ennui, de sang et de querelles monotones. La guéguerre accélère le cycle des cimetières. Les princes de Bourgogne se distraient sans vergogne à la tuerie des peuples. La volonté, soleil mort des visages, borne le front des pouvoirs. L'idiotie règne en majesté, roi ivrogne de l'humanité.
J'ai choisi un raccourci. Loin des bandits de grands chemins et des historiettes à gonflette. Je dédaigne les charniers ordinaires. J'interroge l'histoire par le détour des beautés. J'use mes yeux au Louvre. J'examine les traces de doigt laissées, la sueur sur la pierre des travailleurs de lumière. J'apprends le temps des édifices. J'engrange la leçon de fastueux artifices.
J'oublie les noms, les dates. Je regarde les couleurs qui colmatent la fureur des pleurs. Je garde le silence. Je ne veux surtout pas d'histoire.

jeudi 29 novembre 2012

"Rumpf"

Dans la bagarre de la droite, les mots ne sont pas saufs. Ils saignent aussi, ils perdent du sens. La sécession des hommes de Fillon se cristallise dans une faction baptisée "Rump". R comme rassemblement. R comme le RPR d'avant-hier.
Le mot "rassemblement" se juxtapose au mot "union" qui veut dire la même chose. Kif kif bourricot.
La sédition double la mise unitaire. Deux synonymes fondent le nouvel acronyme. Copé prononce "Rumpf". Avec malignité. Le rajout du "f" évoque une fuite d'air. Il laisse entendre un bruit de baudruche qui  se dégonfle.

L'ogre de l'Elysée

Idées prétextes, intérêts en tête. L'Elysée est paré de charmes d'Etat qui enivrent ses candidats. C'est un palais convoité qui altère la raison des plus modérés.
Copé le fourbe et Fillon le tâcheron se cognent à l'illusion d'un même songe. Ils ont gravé leur destin dans un marbre imaginaire. L'Elysée fantasmé transite par le marchepied d'une Ump, même plombée.
Copé s'estime intellectuellement supérieur. Fillon revendique avec Matignon une légitimité meilleure.
La haine les embastille dans sa prison. Elle jette un voile sur leur lucidité. La lutte agonistique exprime l'horizon ultime de l'ambition politique.
Ils se ressemblent trop pour consentir à la victoire de l'autre. Ils sont trop égaux pour apaiser leurs egos. L'objet de leur passion ne souffre aucune entorse. Il est d'autant plus désiré qu'il est éloigné. Girard a tout dit sur pareille bagarre.
Ils sont possédés par le diable de la rivalité chimérique. L'Elysée à cueillir est situé en deux mille dix-sept. C'est un ogre insensible qui déjà mange une batailleuse marmaille.

mercredi 28 novembre 2012

L'anniversaire d'un "super-menteur"

Chirac, quatre fois vingt-ans, a vieilli vite, hors des chienneries addictives d'un pouvoir excitant, décline à toute allure, rangé des voitures. Il a l'âge du dernier de Gaulle, terrassé à Colombey.
Au soir d'une improbable victoire, Copé évoque sa mémoire, exprime sa reconnaissance "personnelle" à l'endroit d'un mentor cabossé, couturé de partout.
Chirac a raflé la mairie de Paris, au nez et à la barbe de la noble Giscardie. Il a chapardé l'Elysée en renard de poulailler. Il a démenti la bien-pensance des pieux bavardages et des doctes sondages.
Copé ressuscite l'image d'un Chirac, un peu voyou, "super-menteur", bousculant les pronostics, brûlant les politesses, à la hussarde. Copé fête à sa manière l'anniversaire du vieux chef:  il ravive, avec une même impétuosité, le souvenir de ses prouesses.

lundi 26 novembre 2012

Un seul peuple

"La colère du peuple de droite". La manchette du Monde provoque aussitôt la mienne. Car il est inapproprié de procéder à la partition du peuple, notion indivisible comme la nation.
Il est vrai que l'expression "peuple de gauche", souvent proclamée, revendique une improbable légitimité. Pourquoi pas, pendant qu'on y est, "un peuple du centre" ? Le peuple ne se fractionne pas en travées d'hémicycle.
La République ne souffre qu'un seul peuple français, riche de sa diversité et de ses libertés.

Un voyage de trente ans

Jackéguéna, c'est deux prénoms qui n'en font qu'un. Jackéguéna, c'est le nom d'une saga. Jackéguéna sont des voyageurs nés.
Tout commence entre eux par le transport amoureux. Mais le transport amoureux ne leur suffit pas. Car ils sont amoureux, tous deux, des transports. De tous les transports possibles. Qui dit Maussion, dit locomotion.
Auto, bateau, chevaux, c'est leur métro, boulot, dodo. Auto, bateau, chevaux. Pourquoi chevaux ? Parce qu'ils se sont mariés sous le signe de fiers destriers, sous le signe du Haras du Pin, sous le signe des pur-sang et des bois environnants. Or ces bois, ces pins du haras annoncent les bois de Tertu.
Bois de Tertu dont Jackéguéna tailleront des glissières d'autoroutes qui, en trente ans, couvriront la terre entière.
Auto, bateau, chevaux. On ajoute au pot, l'avion. L'avion des Maussion vole de Chine au Chili. Tertu, Normandie, est à portée de Patagonie.
Mais Jackéguéna aiment les transports à la folie au point même d'y embringuer leurs mollets apprentis.
Grand papou enfourche sa machine, appuie fort sur les pédales, la tête dans le guidon, grimpe les côtes en se déhanchant. Grand papou amorce une nouvelle carrière de cycliste.
Et grande mamou dans tout cela ? Je ne sais pas. Elle regarde grand papou, d'un oeil amusé, courbé sur sa bécane. Le vélo lui aussi revendique sa part de gâteau. Vélo a rejoint auto, bateau, chevaux.
Récapitulons. Enumérons les transports. Auto, bateau, chevaux, avion, vélo, Malo. Malo aussi.
Ce saint d'Irlande ou du Pays de Galles - Wikipedia, quand on l'interroge, s'emmêle un peu les pinceaux - est un modèle d'aventurier des eaux.
Malo évoque les flots, mais pas seulement. Malo chante do, l'enfant do. Malo résume tous les rêves de bateaux de grand papou et de grande mamou. Malo est une sorte d'enfant de la balle, élevé au voisinage des eaux. Malo des mers est le jumeau de Gabriel, son frère qui, lui, porte un nom d'archange.
Gabriel, l'adorable angelot, est messager du ciel. Gabriel chahute un peu dans le ciel. Il va plein pot, à toute allure, fend l'azur avec ses ailes d'oiseau.
Malo et Gabriel sont nés voyageurs, l'un des mers, l'autre des airs. Ils ont de qui tenir. Ils ont l'amour des grands espaces dans le sang. Ce sont Jackéguéna crachés.
Jackéguéna - j'ai commencé par là - sont des voyageurs nés. Des voyageurs nés qui ont trente années de bourlingue conjugale au compteur. Ne sont pas près de s'arrêter, n'ont pas envie de tourner le dos au grand large. Non. Pas pour un empire.
Ils piaffent déjà d'impatience dans leurs starting-blocks. Ils sont partants pour un deuxième voyage de trente ans. Ils écopent de la double peine, les deux chenapans, les deux chenapans des cinq continents.
Et nous serons là dans trente ans - à peine moins fringants - pour les noces de diamant d'arrière grand papou et d'arrière grande mamou.
Joué du Bois, le retour, Joué du Bois, saison 2, c'est pour le 24 novembre 2042. 24/11/42, nombre magique, parfaitement symétrique. 24/11/42. Notez-le sur vos tablettes. Save the date comme on baragouine sur Internet.

Le petit lieutenant

Pas de commission des recours mais un appel au secours. Juppé, chef de mission bidon, tend la main à Fillon qui a pris un bouillon et qui cherche un giron.
Fillon et Juppé n'étaient pas faits pour s'entendre. Le volcanique Séguin, mentor de l'un, rival de l'autre, se dressait massivement entre les deux petits lieutenants. Or Juppé, le factotum de Chirac, s'est plu à faire un geste de charité. Il sait Fillon, éternel numéro deux, en demande de protection.
Juppé soigne sa vanité. Question d'étiquette, de respect des hiérarchies. Question d'identité des grades. Juppé n'est pas sans ego: il ne parle qu'à ses égaux. Le coup de main de Juppé à Fillon s'interprète comme le dialogue de deux excellences, de deux anciens premiers ministres, de deux grands hommes à gloire similaire. La conversation au sommet excluait Copé, à moindre pedigree.
Mais Fillon et Juppé ne sont pas des chefs. Ce sont des présidents de commission. Juppé n'a jamais pu s'affranchir de Chirac. Fillon demeure le "collaborateur" de Sarkozy. Sa carrière de second tourne en rond. Juppé vieillit avec sa nostalgie.
Copé rechigne au rôle de porteur de valises. Il s'est établi à son compte. Sert, ou se sert de Sarkozy à sa fantaisie. Sa combativité rappelle l'impétuosité de Chirac à la conquête de Paris, au grand dam de Giscard. Copé roule pour Copé. Il n'a pas le profil du tout d'un petit lieutenant.

vendredi 23 novembre 2012

Juppé, figure de sainteté

Le roman de l'Ump est une illustration saignante de la pensée girardienne. Fillon, Guaino, Karoutchi. Les lieutenants du séguinisme se regardent en chiens de faïence. Ils se détestent comme des pestes. Ils se jalousent comme des frères. On ne se pardonne rien quand on est paroissien d'une même chapelle.
Ajoutez Juppé par dessus le marché. Juppé, né coiffé, ne demande jamais rien, sauf à être sollicité au sommet, sans serrer une main. Fillon revendique le giron de l'ennemi juré de son mentor adoré. Le vieux rival de Séguin se pourlèche les babines.
Juppé rejoue la phrase de Chirac. "Juppé est le meilleur d'entre nous". Il trône en majesté sur un parti déchiqueté. Juppé le père se compose le visage de Jupiter. Copé s'est fait tirer l'oreille. Les deux chiraquiens de souche s'apprécient peu. Juppé est désormais courtisé comme une divinité.
Fillon, plus récent dans ses galons d'ancien premier ministre, lui avait brûlé la politesse. Juppé tergiversait. Voulait secrètement se présenter à la présidence. Fillon, en ami des bolides, le doubla sans un regard. La mémoire de Juppé ne flanche jamais.
Bref, Juppé se compose le visage d'un sage au-dessus de la mêlée Ump. Autorité morale. Ses postures d'extrême lassitude disent son grand âge. On a oublié les emplois fictifs de la mairie de Paris. On zappe les démêlés avec la justice, la condamnation, l'exil au Canada. Juppé était alors une victime émissaire.
Juppé veut rompre avec son passé sacrificiel. Régner, loin du peuple, sans porte à porte, lui va comme un gant. Juppé siffle la fin de la récréation. Le parti de la droite, dont il rédigea les absurdes statuts, lui appartient de droit. A la faveur d'une belle pagaille, Juppé est remonté sur son cheval. Ce preux politique, pourfendeur des bourrages d'urnes, est en voie de canonisation. Juppé se prête sans se forcer au jeu de la figure de sainteté.

jeudi 22 novembre 2012

On fête un fils

Ruée dans les escaliers. Les proches s'approchent. La petite foule s'est répandue comme une flaque. Porte close de la quatrième chambre. Les familles s'endimanchent. Les avocats règlent leurs manches. La liturgie du serment exige procession et recueillement. La confrérie baptise. Le bâtonnier marmonne son sermon. Se plaît en plaideur. Sourit à son nombril. Se complaît dans l'excellence de soi.
Les officiants dissertent de "léontologie" ou science de Léon. On engrange des images. On perd le fil du boniment. Le spectacle des robes noires évoque la distribution des prix des collèges de naguère.
On boit un coup au bar du caveau. On trinque de bon coeur. On sait les fourberies de la vie. On se serre en famille comme des princes en exil.
Razzia sur les pizzas. On rit. On fête un fils. On dément le serment d'ivrogne. La tablée des sept est gravée dans nos têtes. La joie luit dans la nuit.

mercredi 21 novembre 2012

Les liens du gang

Mafia et politique s'accordent sur les valeurs. La famille et la morale définissent un même code d'honneur. Le parti est une structure clanique, peuplée de frères ennemis. On s'y étripe, on ne se quitte pas. Les malfrats corses pratiquent la vendetta, ne tolèrent aucun manquement au respect de la figure patriarcale.
On ne s'affranchit pas du lien partisan. L'étroitesse d'une famille vaut mieux qu'un solitaire exil. Fillon battu s'interdit le grand large. Il reste au chaud dans sa famille. "Naturellement". Liens du sang, liens du gang.
La pègre est sincèrement tracassée par la morale. Elle tue de bon coeur, sans frivolité, pour le maintien des règles. Le bandit de grand chemin est taraudé par le bien. La tricherie des démocraties résulte de l'intérêt supérieur des partis. On s'y désole des "fractures morales".
La morale est la religion des voyous. Ses officiants ont la foi du charbonnier. "Ils mentent de bonne foi" comme dit joliment Bernard Tapie.

Une entreprise qui m'intéresse

"J'ai 22 ans. Je suis un jeune sans emploi. J'ai envoyé des CV par centaines. Sans succès. Hier j'ai regardé la télévision et j'ai entendu parler de la COCOE. J'avoue que je ne connaissais pas. C'est une entreprise qui m'intéresse. Je suis assez motivé.
Pouvez-vous me donner ses coordonnées ? Merci d'avance."

mardi 20 novembre 2012

Les lauriers sont Copé

On parle de sérénité, les mâchoires serrées. On échange des sourires de coin. On remue des lippes gourmandes. Les mots des lieutenants tranchent avec les arrière-pensées du moment. 
Les rictus se creusent. Les regards sont des poignards. Les yeux des deuxièmes couteaux jaillissent des fourreaux. Les états d'âme sont aiguisés comme des lames.
Il en va des carrières de messieurs les porte-serviettes. Et puis, patatras ! Les sondages sont démentis. Les lauriers vont à Copé. Les figures s'allongent autour de Fillon, le débonnaire tonton.
Le cercle des ambitieux neveux se mord les doigts. Les irrite que Copé les déshérite. L'oncle Fillon n'était pas l'investissement de père de famille, l'engagement politique sans risque, idéal pour un budget moyen d'arriviste.

lundi 19 novembre 2012

Le Picasso du pouvoir

Portraitiste de talent, Mélenchon peaufine la grande toile gouvernementale du quinquennat. Au centre du tableau, figure en majesté la peinture d'un président "capitaine de pédalo". A sa droite, le pinceau du maître a esquissé le premier ministre sous les traits "d'un petit politicien de province sans imagination".
Il appartient maintenant à l'artiste d'ébaucher la piétaille des ministres. A l'arrière plan de l'oeuvre. On sent déjà que le Picasso du pouvoir est déterminé à soigner l'image de Valls.
Il est même démangé par l'envie de croquer le lointain successeur de Fouché. Le ministre de l'intérieur est dans le collimateur. C'est son tour. Mélenchon, notre Pablo des micros, aiguise son crayon. Va ouvrir sa grande gueule. On a lu Oscar Wilde: "On ne résiste à la tentation qu'en y succombant".

Fouette cocher !

Le fouet du cocher importe autant que le cheval de trait. Le doigté de Saint-André, driver du Quinze tricolore, galvanise les costauds du rugby. Le verbe de Deschamps, mentor des footballeurs, sublime à merveille les mercenaires à millions du ballon rond.
Picamoles, pic de la Mirandole d'une mêlée sans mollesse, range le splendide Harinordoquy au musée des vieilleries. Le lutin Valbuena marque à la Messi contre l'Italie. Ces deux grands joueurs, ignorés jusqu'alors, reviennent du diable vauvert.
Période faste. Fouette cocher ! Le rugby français étrille l'Australie et l'Argentine. Wallabies et Pumas. Les hommes de Dédé la Dèche dominent l'Espagne d'Iniesta et l'Italie de Pirlo. Souveraine maîtrise des rênes de Deschamps et Saint-André. Mieux que des "coaches", vous êtes des cochers entre rage, panache et courage. Merci messieurs.

Une fille publique

Fillon a patienté dans le froid. Il a poireauté une heure sur le trottoir avant d'entrer dans l'isoloir. Il n'est pas sûr qu'il en soit ressorti. Car rien ne ressort de ce scrutin de maffiosi. Omerta sur les résultats.
Les bulletins tombent du ciel, se ramassent à la pelle. Comme des feuilles mortes. Aux couleurs fauves de l'automne. Aux couleurs de fraude de petits hommes.
La démocratie de parti est une fille publique, la traînée des cités qu'on viole à sa fantaisie. Copé sourit, un peu blafard, toujours bavard. La droite est décomplexée, voire même dévergondée.

samedi 17 novembre 2012

Clichés d'Europe

On se lasse des cartes postales. On se fatigue des facilités de pensée. J'en ai par-dessus la tête des bavardages de coin de comptoir. L'Europe est à inventer. A ré-interpréter.
Le Calabrais thésaurise comme l'Ecossais. Le Germain dépense comme un Macédonien. Le Lorrain marchande comme un Napolitain. Le Catalan travaille comme l'Auvergnat. Le Portugais joue au rugby comme un Irlandais.
Les pays protestants sont jouisseurs et menteurs. Les contrées catholiques sont austères et disciplinées. Les Nordiques sont des gens indolents et les Méditerranéens des brutes de travail. La grisaille endort les corps. Le soleil réveille les morts.
Désagréger les clichés, dépiauter les peuples de leurs oripeaux. Voilà l'Europe de mes desiderata.

vendredi 16 novembre 2012

Cannabis, ter et quater

La réalité déçoit. Car loin de soi. Loin des souhaits. On l'acclimate comme on peut à la douce intimité. On repeint le monde extérieur aux couleurs du for intérieur.
La consommation de cannabis s'inscrit dans une logique d'escamotage des périls, de camouflage du réel. La drogue apprivoise l'étrangeté du monde. Elle humanise les bourrasques de violence et de non-sens.
C'est pourquoi le sujet de l'actuelle cité-monde s'y abandonne à l'envi. Il se jette comme une bête sur la cigarette. Il plonge dans l'alcool. Il se vautre dans le travail, le sexe et la bouffe. Il cède au culte du web, des sons et des images. Il se livre aux bâillons des religions. Il s'incarcère en Enfer. Bref, il aliène sa liberté à tous les cannabis, ter et quater de la terre.
La reddition à l'addiction signe une perte d'autonomie. L'homme d'aujourd'hui y consent malgré tout. Il se dérobe au duel frontal avec le réel. Trop dur.
Il se soigne avec les moyens du bord. Il emprunte l'itinéraire cannabis à destination d'un cap imaginaire.
Il s'y fourvoie. La drogue est une passerelle de fortune entre le monde et nous.

mardi 13 novembre 2012

Un bout de soie

Sa cravate de travers indique une direction, peut-être un but, voire même un cap. Secret d'un bout de soie. Gardé pour soi. Hollande n'en dit pas plus que le tissu. Il ne lâche pas le morceau.
Hollande louvoie dans ses phrases, à l'aise dans ses mots, en bonne intelligence avec son impopulaire gentillesse. Hollande manie l'ironie comme une solution aux questions. Certaines jolies femmes rient ainsi, faute de répartie.
Ne voit pas l'avenir en noir. Noir de jais comme ses cheveux teintés. Ne voit pas l'avenir du tout. Regarde derrière pour se satisfaire de la route accomplie. Le chômage n'a pas d'âge. Il souffrira bien un an de plus.

lundi 12 novembre 2012

Le ministère de la parole

Fillon pépère ou Copé filou. Sage sourcilleux ou guerrier fougueux. La droite balance entre deux styles.  Empire ou Restauration. L'histoire bégaie. Fillon se "balladurise". Chute de chaise à porteur, à l'appui. Copé se "sarkozyse". Avec le risque de forcer le trait.
Fillon veut en finir avec sa carrière d'éternel second. En revanche, Copé s'est toujours imaginé premier.
Les deux candidats briguent le ministère de la parole qui échoit au chef de l'opposition. Le maire de Meaux aiment les mots.
Le ronron monocorde de l'ex de Matignon modère l'ardeur du parler choc de Copé. La droite s'interroge sur le choix de son meilleur chantre.

dimanche 11 novembre 2012

L'avenir de La Tour

Au bout de la galerie, le tricheur de La Tour fait tapisserie. L'espace est lieu de passe-passe. Les mains voltigent, les doigts dansent, brouillent les apparences. Volent et voilent sur la toile.
L'as de carreau complote par derrière. Fait voir un dos.
La Tour a peint la lumière à même la couleur. Economise un bout de chandelle. Je coince mon épaule à l'angle du mur. Je me cale à l'embrasure. J'observe de travers. L'aile Richelieu connaît un creux. Personne ne songe à s'égarer dans un hangar à regards.
A deux escaliers de là, Caravage est exposé sans tralala. On change d'étage. Sa diseuse de bonne aventure trace l'avenir de La Tour. Pontormo ne dit mot. A sa manière. Fine et précieuse.

samedi 10 novembre 2012

Tosca

Opère la loi du chant de Floria. On sort de Tosca requinqué de joie, rehaussé de gloire sonore. Vibre en soi l'écho d'une grandissime soprano.
On s'attable, groggy par Puccini. Il y a à boire et à manger. La plainte de causeur rompt le fil du bonheur. Une logorrhée de société balaie d'un trait l'intimité d'une paix.
On malaxe une matière dégueulasse. On se dégrise à la morne entreprise. Les mots déballent un lot de rancoeur ordinaire. On bavarde affaires de menus patrons, de chefferies du lundi, comme on parle chiffons. Tosca s'est tue sous les chahuts d'un moi ostentatoire.

vendredi 9 novembre 2012

Une main de bénédictin

Novembre ravive le chagrin. On oublie les rois de fantaisie des dernières décennies. Le défunt du jour, c'est de Gaulle et son drôle de corps.
Il a quitté la maison. Quarante-deux ans qu'il pleut dedans. Les tuiles dégringolent. On attend que quelqu'un rafistole. Nous manque un travailleur grandeur nature, un bâtisseur de toiture. Les missions d'intérim sont ruines des nations.
De Gaulle est ordinaire jusque dans sa mise en terre. Il fonde un ordre, dira Malraux. Il ne veut rien, voit le vide. Il a la force de ne pas désirer. De Gaulle échafaude une république gothique. Il a taillé l'édifice d'une main de bénédictin.

jeudi 8 novembre 2012

La cupidité des élus

Le rapport Jospin réactive le corporatisme parlementaire. La gent politique pousse des cris d'orfraie. Le cumul des mandats est un privilège de caste. Gauche et droite le défendent mordicus, au nom d'une juste démocratie.
Ils justifient pareil archaïsme au motif du sacrosaint ancrage local, nécessaire à la bonne écoute du peuple. La République, une et indivisible, cède à la pression terroriste du "terrain".
Fadaises et billevesées ! La démocratie a bon dos. L'hypocrisie règne en despote. Elle dissimule une logique de gros sous. Le cumul des mandats autorise l'addition des rémunérations. Il enrichit l'élu. Sous de grands airs démocrates, l'élu collectionneur masque une cupidité de mercenaire.

mercredi 7 novembre 2012

Noir et blanc

Il est blanc comme un linge. Il bredouille un volontarisme étriqué. Il serre ses petits poings pour illustrer  un modeste dessein. Ayrault prend mal la lumière, "ré-enchante le rêve français" de curieuse manière.
C'est un éteignoir d'espoir qui ne provoque pas de hourrah avec sa TVA.
Il est noir comme un basketteur de NBA. Il n'a pas peur d'être une star. Il plaît aux nababs d'Hollywood. Il trimbale un physique de victoire. L'Amérique veut le croire, a besoin de belles histoires.
Obama gagne haut la main. Ayrault perd ses moyens. La télévision départage les deux gladiateurs. La morale du vainqueur est celle du Vingt Heures.

mardi 6 novembre 2012

Rapport à l'export

C'est un pays d'industries pourries. Aux produits qui ne font pas envie. Hormis aux gentils Quataris. On y ferme les usines comme des parenthèses.
C'est un pays qui fabrique de l'écrit à qui mieux mieux. Qui forme des scribes de haut niveau. Au plus fort des crises, il y pleut des rapports. Avec succès. Les tables de la loi Gallois visent un destin de best-seller. Dixit le pape bien informé du redressement productif.
Nous jouissons d'un savoir-faire légendaire dans la confection d'études. Pébereau, Attali, Gallois sont des orfèvres en matière de memorandum. Dès lors, il conviendrait d'organiser l'industrie du rapport en filière prioritaire à l'export.

lundi 5 novembre 2012

Louvre gratuit

Je gravis l'ultime étage de l'aile Sully, à rebours de la chronologie. Je bivouaque dans des galeries vides à lumière livide. Les chemins de Mortain voisinent le paysage romain. Corot n'a peint ce matin que pour un gardien qui se tient à carreau.
Je salue le geôlier du lieu. M'assieds devant le beffroi de Douai. Je regarde la couleur de craie. Je bavarde avec la toile. Le gardien baisse la nuque. On dirait un condamné. J'ai la sensation d'une pièce muette, de trois acteurs sans texte, échoués là. Le gardien, moi et le beffroi. On ne se parle pas, chacun à sa manière.
Delacroix ne fait pas le poids. Zéro regard. L'orpheline au cimetière crie dans le désert. Son oeil de cheval s'adresse grand ouvert à Picasso, le peintre de l'enfer. Sans Delacroix, pas de Guernica. Les visiteurs ont peur. Ne se frottent qu'entre eux dans de laborieuses queues leu leu.
Louvre gratuit. Happy hour dans les galeries. On a les yeux embués. On trinque avec une jeune fille égarée.

samedi 3 novembre 2012

Freud sans tabou

Dans le dernier Monde des Livres, je lis ces mots touchants d'un père de famille vieillissant. "C'est le seul plaisir sans mélange que de pouvoir donner de l'argent à vous, mes enfants, ou à maman ou à tante; c'est cela seul qui me rend le travail supportable".
Ce dangereux papa s'appelle Freud. Il partage un sentiment largement répandu. La transmission du patrimoine récompense une vie de labeur.
Or l'Etat s'introduit par effraction dans le cercle de famille. Il s'arroge des deniers qui ne lui sont pas destinés. En use sans consulter ses bienfaiteurs. Autrement dit, la taxation de l'héritage impose l'Etat en sa qualité de fils adoptif. La fiscalité des successions, toujours plus confiscatoire, octroie à ce fils de roi la part du lion.
L'héritier abusif, détenteur de la violence légitime, s'invite au banquet familial avec une arrogance de despote. Freud, sans tabou, sans même le nommer, touche du doigt le scandale de l'Etat.

vendredi 2 novembre 2012

L'ouragan des riches

On s'apitoie sur le sort de Manhattan. L'Amérique dénombre une centaine de morts. A Haïti, les hommes ont péri dans l'anonymat d'un monde sans médias.
Sandy pimente le duel Romney/Obama. Sandy est l'ouragan des riches. Manhattan mobilise l'attention, focalise la compassion. Nos démocraties sélectionnent leurs émotions.
Haïti panse ses plaies dans un silence de réprouvés. Je songe à La Fontaine. Le texte s'appelle "Les animaux malades de la peste". Je retouche un peu la fin du poème. "Selon que vous serez puissant ou misérable, les caméras des médias braqueront leur lumière ou jetteront un voile pudique".
On manque de fables pour comprendre le réel.

Le trou du centre

Le milieu a fait long feu. Le coeur se meurt de tiédeur. Le centre s'est fait plus gros que son ventre. Le centre a fui à la périphérie. C'est un point de géométrie, une vue de l'esprit, une fantaisie.
Le centre est incarné par le pontife du moment, le chef élu du peuple émotif. Le président de la nation se situe au centre, par définition. Le fait majoritaire l'installe à mi-chemin, au milieu des idées du scrutin.
Au centre est la demeure d'une balle. La vie politique consiste à shooter dedans. Dès lors que la partie se joue, le centre est vide.
En attendant Borloo comme on poireaute avec Godot. Le centre est un ciel sans Dieu, un espace silencieux. C'est un lieu de transit, une ligne d'horizon pour l'orientation. C'est un pli qui démarque la partie droite de sa jolie gauche.
Bayrou est tombé dans le trou du centre. Après Giscard, sans espoir de pouvoir. Trou noir de l'histoire. Car le centre conduit à l'amertume des grandes solitudes. Faute de troupes, ses chefs sont narcissiques. A scruter leur nombril, ils choient dans un puits, chutent dans l'imaginaire, comme les ivrognes sombrent dans l'alcool, s'oublient dans l'éther.
Il n'a pas de place pour le centre. D'où le rituel ordinaire de ses penchants suicidaires.

jeudi 1 novembre 2012

Taille moyenne

On se lasse de leurs radotages. Ils dissertent d'économie comme des buveurs de pastis au café du commerce. Ils s'accoudent au comptoir comme une marionnette de Borloo. Ils ne refont pas le monde. Trop de boulot. Ils réinventent l'entreprise. Ils la rêvent bien proportionnée, ni géante ni menue. Jolie comme un coeur. Un coeur de métier.
Un même leitmotiv dégouline de leurs lèvres songeuses: "On manque d'entreprises de taille moyenne".
Au café, on crée par décret. A l'Elysée, on crée par décret des tonnes de papier, jamais la richesse d'une société.
L'entreprise résulte d'esprits mal formatés, dos au mur, infichus de se plier aux plates docilités du salariat. Elle comble un désespoir ordinaire, satisfait le besoin de s'en sortir.
L'entreprise ne naît pas moyenne. Mais petite, infime, réduite à l'illuminé qui la crée, contre vents et marées. Nos énarques de comptoir, nos sympathiques buveurs de pastis, si bavards au bistrot, ignorent que l'entreprise moyenne se situe au bout d'une trajectoire de croissance.
Ce sont les conditions de son essor qu'il convient de favoriser. D'où l'impérieuse nécessité d'alléger les charges et la fiscalité qui pèsent sur les coûts, l'embauche et l'investissement.


"L'absente de tout bouquet"

Il tait la singularité, l'installe en sa langue étrangère. Veille à la forme irrégulière. Dessus la toise ne s'apprivoise. Mallarmé, dont j'aimais "l'instinct de ciel", respecte le sommeil des voyelles.
Je songe à Camille et Lucile. A la fille Claudel, la môme d'argile, à l'aînée du René, à deux soeurs jumelles. A l'angle mort des beaux arts.
Je prie pour le renouveau du rouge coquelicot. N'ai de chambre à moi que pour "l'absente de tout bouquet". Je guéris de Mallarmé comme Bartimée à Jéricho.