lundi 5 avril 2021

Mort aux oiseaux !

Un rêve d’enfant s’envole avec le temps, n’appartient qu’à ses parents. Un rêve d’enfant ment, illusionne le garnement, oriente ses projets de tyran. Par définition, l’enfant ne parle pas, nous enseigne le latin d’autrefois. Il se tait, répugne à la volubilité. Il regarde les nuages. Il songe, ronge ses ongles, grimace devant une soupe ou le visage d’un oncle. La songerie d’un gosse est inflammable. L’édile d’une ville a désigné le péril. La dame de Poitiers n’a pas fléchi, interdit pareille momerie. Une civilisation poitevine s’honore à fixer des scellés sur les rêvasseries de jeunes écervelés. La dame s’y emploie. Jadis les gamines idolâtraient les speakerines. Elles fétichisaient une femme potiche aux apparitions journalières de vierge immaculée. Rêverie détestable. La secouriste du chef-lieu poitevin en délivre les mioches, les préserve des mochetés stéréotypées. Les enfants sont dans la lune. Y vivent sans amertume. Séjournent dans un monde léger comme une plume. A Poitiers, on déconne grave, on n’arrête plus les Sarrazins, mais les joyeux bambins. Les enfants qui songent sont priés de remplir une attestation de sortie dans les nuages, un certificat de rêverie, d’en cocher la bonne case. La brigade veille. Les rêves sont mauvais, par essence, nécessite une éco-vigilance. La municipalité réfléchit à une fiscalité onirique, travaille sur le sujet, envisage la taxation des cauchemars de moutards. L’aéroclub et ses carlingues de dingues sont des bizarreries obsolètes comme les houillères, les sapins de Noël, le Tour de France et ses majorettes. A vrai dire, la suppression des avions est une demi-mesure, un projet qui pèche par timidité, qui manque de radicalité. La dame veut reboiser les tarmacadams. Très bien, mais insuffisant. Car l’avion ciblé n’est jamais qu’un artefact, un oiseau manufacturé. Plus qu’à la copie, c’est à l’original que la maire de Poitiers doit s’attaquer. Le rêve d’Icare procède du vol d’oiseau. Les volatiles sont à la racine des rêves infantiles. Qu’à cela ne tienne. Le pays doit réquisitionner les guerriers appropriés, les chasseurs invétérés, avocats ou vétérinaires, du style Larcher ou Dupont-Moretti. On a le choix parmi les viandards illustres. Les bêtes à plume sont à l’origine des vols sur la lune, produisent les délires de gosse d’Elon Musk. A l’image du « grand débat » qui jadis mata la révolte des gueux, une grande battue s’impose à travers champs. « Mort aux oiseaux ! » Tel est notre cri d’écologie. En cas d’échec et de rêves d’enfants persistants, subsiste la solution extrême de l’infanticide généralisé. Le hic majeur, c’est qu’elle contrevient aux pieuses valeurs dont nous sommes fiers. C’est un plan B risqué.

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