jeudi 19 septembre 2024
Le raillé du sérail
Matignon accueille un nouveau maquignon. D’emblée, un pas de montagnard qui surligne l’intacte énergie malgré l’âge de vieillard.
Sur le perron qu’il laisse au père, un jeune homme noiraud se tasse dans l’insignifiance d’un numéro de danseur de tango.
Le fils s’épanche. Il m’aime, il nous aime, rue de Varenne. Il s’est amouraché des Français. Le père se penche à peine. Le sortant disserte sur le temps, le bon temps, le beau temps sans la pluie.
Le vieil ennuyeux, le vieux tromblon promet l’action d’une voix détimbrée, les bonnes solutions dans une chevrotante diction.
Entre le vendeur de cravates à l’œil furibard et le notable compassé d’un siècle antérieur, les sourires feints masquent une antipathie d’instinct.
Barnier, le nouvel entrant, le plus haut sous la toise, est bien élevé, taillé pour l’hôtel particulier. Il tend sa main. L’autre se force à l’applaudir, évite ainsi de la lui serrer. Mais le grand dadais est un roué des marchés. Il pose sa paume lentement sur l’épaule du jeunot, les doigts dans ses bravos.
En quittant la scène du perron, je songe à Delon. L’effet Barnier, hasard de calendrier, c’est la même nostalgie d’un temps périmé. Un port, une manière. Une élégance à l’ancienne. Barnier était jadis le raillé des bien nés, la risée des énarques, le souffre-douleur des intouchables diplômés de la rue des Saints-Pères. C’est aujourd’hui la revanche d’un “coiffeur”, la minute de célébrité d’un délaissé du banc de touche.
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