jeudi 6 mai 2010

Pouah !

On se presse devant des bouteilles couleur de groseille. On se serre la main, un verre dans l'autre. Les vignerons endimanchés récitent le bénédicité de leur métier. On boit érudit, deux gouttes de vin, remuées avec simagrées et respect poli. On boit du Bourgogne, sans vergogne, avec des pincettes. Dégustation rime avec compétition. Tous ces crus sont destinés à être bus, un peu de chaque, au pas de charge.
On s'imagine lire à la suite un paragraphe de Proust, quatre lignes de Céline, quelques fragments de Cioran, une demi-page de Gracq, un bout de confession de Rousseau. Pouah ! On recracherait pareille bouillie comme des cendres volcaniques.
C'est une fête de gens de presse chez un boutiquier en vins de qualité. Ces mondaines fredaines ignorent le goût mesuré, la lenteur de la simplicité, le plaisir de l'unicité.

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