mardi 8 mars 2016

Autoportrait

Pourquoi les histoires m'ennuient-elles ? Parce qu'elles se déroulent, étirent un fil, se traînent en longueur.
J'aime les sauts, les bonds, les Illuminations de Rimbaud. L'histoire s'envase en racontar. Elle bafouille un boniment, échafaude une vanité, se justifie d'un début, d'un milieu et d'une fin.
J'appartiens ici au monde des épiphanies. L'événement suffit au temps. Il est la lumière de la terre. Je m'éclaire à la bougie. Ce qui advient ne ressemble à rien, jette une beauté de circonstance indomptée.
J'ai nommé le rude bouquin La cicatrice du brave car je veux sauver ma peau, me remémorer l'entaille de canine, l'instant vif du coup de griffe.
A la terrasse d'un bistrot sans orgueil, j'ai vidé un calice de vin mauve. J'ai senti Alberto Giacometti dans mon dos. Je veux faire une tête. Je rate figure sur figure. Tous les visages sont des vertiges. Ni la pierre, ni la toile ne modèlent ni ne fixent la première apparition.
Qu'à cela ne tienne, je recommencerai l'autoportrait fragile, livre deuxième comme un second évangile. J'observerai l'épiphanie avec d'autres yeux, d'autres mots, d'autres outils d'établi. J'échouerai. Je relaterai mes essais d'incarcéré. Tout ce que j'écrirai ne sera désormais que du crayonné d'autoportrait, du raturé d'impossibilité.

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