mercredi 15 janvier 2020

Voyou, voyelle

Septième étage. Rooftop de ouf. L’Excelsior est désert. Napoli se lit dans un ciel. La mer, lisse et tentatrice, se fendille, miroite au soleil. Rien n’est moins bref que le golfe de janvier. Je songe à Matzneff, à ses frasques, à sa phrase. A Ferdinando Galiani, à ses écrits de fantaisie.
Piazza del Plebiscito, j’ai croisé Gemito, sa frimousse en terre cuite. Les voix sont peintes, fardées d’un rouge sonore. Napoli n’est jamais malpolie : simplement elle enseigne l’émotionnelle intensité d’une voyelle. Via Toledo, on dégringole les pavés inégaux parmi l’écho d’une clameur, un chahut d’émeute, une foule à bigarrures.

Naples est un tintamarre de bord de mer. La mouette du parapet inspecte l’éternité. Ce cri d’écorce, c’est une colère de bête. La mouette couleur de craie taillade d’un cri les étrangetés de la terre.
Depuis de longs étés, les brunes ragazze sont des beautés décarbonées. Elles s’enlaidissent à blondir, civilisent une noirceur dans des figures sans désir.
Les voyelles ont mauvais genre, observées des voyous. L’incartade et l’algarade sont des manières de dire, des exercices de style. Chez Gambrinus, les jeunes serveurs ont les cheveux crantés, d’insistantes gueules d’olibrius.

Faire plaisir est entaché du péché de satisfaire. Près des platanes à géographie morcelée, au voisinage des racines éléphantesques du lungomare, le soleil chauffe la nuque des vieux chnoques. Un ciel d’hiver régénère l’imaginaire, libère l’incarnat d’une chair. Une ombre ciselée tarabiscote les façades acidulées des palais.

Le vacarme est dans une couleur, le tumulte dans une rue, la stridence entre deux désirs. La mer amalgame ses peaux, cuirs, bleus dépareillés, ses sourires rapiécés, ses pétarades de théâtre. Avec des doigts virtuoses, Luca Giordano bâcle une toile à format grandiose. Taxi ! La lumière de Napoli, les yeux bleus d’Italie, se sont perdus comme un paradis en Mésopotamie. Dans l’avion réglementaire, deux jeunes gens en tenue d’officiers jouent au marchand et à la marchande.  C’est fini.

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