vendredi 30 avril 2010

Sainte Anne

On voit des fous, lents et muets, violents et langues déliées, nus et éperdus, prostrés sur un lit défait, en chiens de fusil. Ils quémandent une cigarette qu'on leur accorde sur leur bonne tête. Un ballet de blouses blanches tournoie autour des draps, neutralise l'errance d'une voix grondante, s'active à redresser l'erreur des corps.
L'aliéné et l'infirmier marchandent leur intégrité comme deux boutiquiers en tablier. Le fou s'apprivoise par le truchement du médicament. Il se révolte à mesure qu'on le domestique. Il saisit sa liberté, l'impose au silence létal de l'hôpital, joue son va-tout d'homme fou.
Ces corps de cristal sont des acteurs fulgurants, souverains de démesure, qui empoignent à pleine main leur condition. Ils relèguent les professionnels de la comédie dans leur petite cour de récréation. Ils sont incarcérés dans une hospitalité négociée à longueur de journée. La télévision les dévoile, avec l'obscénité de la pleine santé. Dans programme, il y a "âme". Arte a squatté les couloirs de Sainte Anne, parmi les ombres et les regards d'homme.

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