jeudi 14 août 2014

Où qu'ils se trouvent

J'adore La Colle, la Place du Général. J'aime sa mairie pastel, trouée de petits yeux, cernée de volets bleus. A l'heure de boire un coup, le soleil chauffe le genou à La Colle sur Loup.
La rue Clémenceau dégringole jusqu'à de Gaulle. Le chemin du Tigre s'arrête au lit du Loup. Les Collois n'ont d'autre roi qu'un grand gars renégat. A droite, sur le mur de guingois, on lit l'Appel hors la loi. Le coup de gueule côtoie l'affiche de jazz. Mes yeux pétillent de rien. Je me sens bien en pays gaullien. Au bistrot, je bois sans mots l'Americano.
La pizza croustille d'éclats d'olives. Les filles sont taggées comme des couloirs de métro. Aucun été n'a jamais calmé le goût d'épopée des grands fêlés.
Elle était couchée sur son flanc droit. Elle ouvrait de grands yeux blancs d'aveugle. La mort proche délave le regard, nettoie la couleur pure. Elle palpe mes doigts. Je sais qu'elle s'est cramponnée. Je sais, je ne sais que ça, qu'elle va mourir sans un sourire.
Il est un âge où le souvenir n'imprime plus. Il tourne les pages, agite un éventail. Je voyage dans des paysages sans mémoire, dans une géographie d'amnésie. Les arbres miment une mort debout. C'est écrit dans la pierre du village, la parole du petit colonel, le cri pêle-mêle de l'Appel. L'idiot du micro exhorte au sursaut."Où qu'ils se trouvent".
La Colle, deux tourterelles squattent la nappe du ciel. Je songe à ces corps miniatures, ces beautés de poupée, palpitantes de vie au soleil qui finit. Je revois mes doigts sur la plume, la chaleur de soie dans ma paume, l'odeur de poudre encore neuve.



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