dimanche 28 décembre 2014

Ersatz d'Herzog

Mon pouce est posé sur la page comme une petite madone sans visage. J'observe la collerette blanche qui délimite une chair.
J'ai froid sans drap. La Germanie ne borde pas ses lits. La couette, niaise coiffure de fillette, n'habille qu'à moitié mon squelette. Cette manière d'édredon condamne une civilisation. Au sud de la Rhur, les dimanches n'ont d'autre seigneur que la rigueur de l'hiver.
Faute d'attendre la fin des phrases, je cause aux images. Pompidou va mourir. Herzog a trente ans, une progéniture, rien que des films. Je regarde un documentaire à la télévision réglementaire.
L'image est beige comme une neige. Je lui confie le coloris d'une rêverie. Werner Herzog saisit la rectitude d'oiseau, la courbe exacte du saut. Il freine le vol à skis, fixe l'étrange cérémonie humaine. Il guette une prière aérienne.
Les champions sont des pions d'horizon. Ils convertissent la vitesse de sautoir en beauté provisoire. La majesté des corps parallèles agit comme une magie, exerce une hypnose, mortellement tachetée de soleils grandioses.
Hier, quarante années derrière. Je siffle une récréation. Je glisse une rondelle dans le bidule. Je rameute un, deux, trois souvenirs. L'image d'Herzog est cabossée, ses dialogues désossés. J'appelle vandale celui qui désaile un ciel.
Avec l'émoi du doigt, je presse une touche. Je stoppe une mémoire, mêle à ma colère la mauve mélancolie d'un ratage d'industrie. Les manufactures défigurent une nature, ses parures, ses postures. Leurs tags d'époque font des zigzags d'Herzog un brutal ersatz, un numérique cul-de-sac.

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