dimanche 22 décembre 2013

L'avenir dure longtemps

L'année finit sans beauté. Ni grandeur. La chefferie sourit dans une lumière de féerie. Elle prie le peuple de patienter, le supplie de souffrir en silence jusqu'à l'apothéose de la productivité, jusqu'à l'épiphanie d'une croissance. La France stationne sur un trottoir déserté par l'Histoire.
On incarcère le travailleur dans un petit salaire, le chômeur dans une petite misère. L'Etat imposteur abuse du monopole de la terreur. Des acteurs de la rue, il exige un lourd tribut.
Le pays rétrécit au lavage des esprits. Nulle en calcul, la France recule. Foi de Pisa. Les médailles Fields nous illusionnent sur la compétitivité des lycées.
Les gens de médias et de Sénat aboient, défendent bec et ongles des niches fiscales cinq étoiles. Le microcosme s'exonère d'écot, n'acquitte l'impôt qu'avec des mots. La noblesse d'Etat jouit du privilège d'une loi scélérate.
Au nombre des années cotisées et des travaux effectués, les députés de nos contrées sont des pensionnés choyés. La jacquerie des corporations est un cri d'indignation, une révolte contre les marquis et malappris, la colère bleue des gueux. Guéant, Cahuzac ou Placé se font pincer. Car ils exigent davantage de bienfaits. Nos altesses appartiennent à une espèce qui ne rend pas la monnaie de sa pièce. L'exemplarité est une incivilité qui provoque l'hilarité.
Au micro du Crif, Hollande mime l'humour juif, blesse l'orgueil à vif de l'Algérie. La diplomatie du pays rougit des plaisanteries de garçon de bain d'un président de Rotary.
L'indice Insee n'est qu'un cap d'épicerie, jamais la destination d'une nation. La cécité économique dissuade toute vision politique. La gestion notariale est un idéal de vieux canton rural. La gauche gâche, la droite rate. L'avenir empire.
La renaissance viendra d'un surcroît de science. L'école dégringole. De Gaulle avait lu Bergson. Il tarde que le pays s'instruise, n'abandonne à personne le prestige de la raison.
L'année finit sans beauté. Ni grandeur. La démocratie ressemble à une ploutocratie. La République se résume au coup de menton des cyniques. La corruption est une addiction ordinaire des pouvoirs. La faillite des élites est couronnée du satisfecit des déficits.
La solitude d'un mort pèse sur la foule des cimetières. Le présent manque de temps.  Le courage est au bout du naufrage. Décembre 1944, de Gaulle tient la dragée haute à Staline, ne cède pas un pouce sur le sort de la Pologne. Il prévient le Kremlin que "l'avenir dure longtemps" (Mémoires de guerre/Le Salut, page 659, Bibliothèque de la Pléiade).
De même, l'Hölderlin des poèmes exhorte les soldats de première ligne: "Tout proche et difficile à saisir, le dieu ! Mais aux lieux du péril croît aussi ce qui sauve" ("Patmos"/Période des grands poèmes 1800-1806, page 867, Bibliothèque de la Pléiade, traduction Gustave Roud). Ni Hollande, ni Sarkozy ne sont aux fourneaux. Cette croissance-là s'apprivoise avec les dents de la chance.





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