mardi 24 février 2015

Modeste

Il est mort à la saint Modeste. Qui n'est pas la saint Glinglin. Le dernier Modeste canonisé, jésuite alsacien, périt en Chine comme un chien. L'humilité fait l'homme, la modestie le martyr.
Il sommeille dans un fauteuil de velours jaune. Je lis tout bas un ouvrage de foi, l'éloge funèbre de Derrida à son maître Levinas. La noblesse du texte m'émeut.
Je ne suis pas un garçon qu'on désarçonne. Je songe au jour où j'ensevelirai mon père, à deux mètres de regard, que la seule cheminée sépare.
Tous les jours de calendrier s'appellent Modeste. Ce petit prénom sied à son orgueil. Il désigne un vaisseau de ligne de la marine royale. C'est un personnage de bande dessinée dont il possède l'intégrale des albums. Modeste, le fiancé de Pompon, aime la paix, la colère, la nature en hiver. Lui, l'amour et la beauté.
De l'amitié, il se méfiait, comme Proust, n'y croyait qu'à moitié, à vrai dire pas du tout. Il redoutait "cette heure, entre chien et loup" où "le diable est l'ami qui ne reste pas jusqu'au bout" (Georges Bernanos, "Monsieur Ouine", oeuvres romanesques, Bibliothèque de la Pléiade, page 302, 1947).

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