mardi 31 mai 2022

Zéro mort

La finale Cholet/Epinal s’est jouée à guichets fermés au stade Amédée Darmanin, fierté du pays. Le préfet de police Le Boche a supervisé le dispositif de sécurité. Les bandes de Britanniques qui déferlent de Calais ont été neutralisées à l’entrée, empalés dans le tourniquet. Les gredins de gradins n’ont pas profané la sacrosainte enceinte, ni dépouillé les honnêtes familles de nos terroirs. La doctrine de la nation a été appliquée avec bienveillance et tolérance. Sans jamais transiger avec la vertu républicaine d’excellence. Le ministre Géraldo, patron de Beauvau, a salué l’éblouissante performance de Le Boche qui oeuvra sans la moindre anicroche. Zéro mort. La quiétude règne désormais sur les pelouses. Les matches se suivent et se ressemblent. Déjà, dimanche dernier, Blagnac/Laval s’était soldé sur le même score : zéro mort. Le métier de Le Boche et la poigne de Géraldo autorisent ces résultats probants. L’inflation des morts au stade est enrayée, quasiment éradiquée. L’ère du foot rouge, des derbies sanglants, est derrière nous. On parle de Géraldo à Matignon. Le Boche est pressenti à Beauvau.

samedi 21 mai 2022

Lilli, Pap et les autres

Borne. Accent aigu. Entêtée. Bornée. Morne. Accent aigu. Morne-née. Austère par nature. Mère supérieure des Gaulois réfractaires. Bonne sœur de la République laïque. Borne exhorte à la prière, au for intérieur, au sobre labeur. Ecolo, mais pas rigolo. Elisabeth n’est pas une bête des paillettes. Lili Borne est à l’affiche aujourd’hui. Romy Schneider aussi. Lilli, Sissi. Les images se télescopent.L’essentiel est sauf. Une femme à Matignon. La nation sort de Cro-Matignon. Habemus mamam. Habemus papam aussi. L’homme se prénomme Pap. Comme les nœuds au col des toubibs satisfaits, des mandarins des universités. On ne papote que de Pap. Mais on ne chipote pas. Les spécialistes le taxent d’indigéniste. Les mots des élites, je n’y comprends que pouic. La répétitive action du discours d’intronisation du Manu Nouveau a été remâchée des jours et des jours dans l’immobile statu quo d’une attente sans écho. Fini le trou noir du conclave. L’équipe est composée. Prête à jouer. A se frotter au terrain. Il est trop tôt pour siffler des gradins. De Pap, assez suffisant dans son costard cintré, j’aime qu’il nous débarrasse d’un prédécesseur peu exemplaire, brouillé avec l’orthographe. En témoignaient ses posts de fonction, indigents, fautifs, mal relus par ses Nègres de ministère. Pap, lui, est instruit. Le premier bilan est positif.

samedi 7 mai 2022

Moi, je m'appelle Ferdinand

« Guerre » n’est pas un roman de gare. Mais il exhorte à crier gare. S’il sort de sa cachette, c’est pour témoigner que ses câlineries d’écriture ne sont pas de la gnognotte. « Moi, je m’appelle Ferdinand ». Céline se réapproprie le leitmotiv de « Pierrot le Fou », demande à Belmondo de lui restituer les papiers d’identité. S’il vous plaît. L’inaction se passe à Peurdu, patelin paumé, trou d’effroi, bled au bout de la nuit. Le « narratif », comme disent les précieux experts de l’information, c’est le « rendu émotif », l’alphabet stylistique du Professeur Y. Mais le climat de Peurdu leur a donné la berlue. Les héritiers de Gaston balisent la musique du troufion, imposent la loi du lexique. Un bouquin de Destouches exige une retouche, un éclairage, un sous-titrage pour mal-lisants. Céline s’interprète au son d’un petit Gaffiot de version latine. Je convoque à la barre l’autre grand fêlé du dernier siècle littéraire. « Les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère beaucoup moins pure qu’on ne le croit » (« Contre Sainte-Beuve »). La marmaille de Gaston, qui rata les deux champions, se sent prisonnière d’une prose moldo-valaque. L’outil lexical est une béquille éditoriale. Oui. Ferdinand sait comment il s’appelle. Dans une lettre d’avril 1932 au Gaston réfractaire, l’éclopé de Peurdu-sur-la-Lys écrit, sûr de ses ratures, du manuscrit du Voyage : « C’est du pain pour un siècle entier de littérature ». Niet impoli de l’épicier malappris. Mais chez les juniors de Gaston, depuis lors on ne chôme pas, on trime sur Céline, on actionne le fourneau des mots, on n’arrête pas la cuisson.