jeudi 25 avril 2019

Opéra

Nuit d'hypnose avec " Le livre d'image" de Godard sur Arte. Je feuillette dans ma tête. D'une rose, j'effeuille les pétales.
Il faut se taire à cause des guerres et des couleurs incendiaires de la mer. Archives sur le qui-vive, beautés convulsives. La voix de Vissotsky s'extrait du bruit. Malgré l'heure, "je descends à Opéra" nous dit l'opérateur.


mardi 23 avril 2019

Entre deux Chine

La nation est embringuée dans une lutte agonistique. Le freluquet du Touquet s’acclimate aux rues dépavées, aux véhicules incendiés, aux vitrines brisées. A l’Elysée, il calcule en rentier. Le pourrissement enrichit en dormant. Au bout de l’enlisement, au bout du mandat, l’ordre vaincra, forcément.
Les gilets fluo s’accommodent d’un ressentiment dément, d’une rage hors des mots d’ordre d’usage. Les extrêmes jaunes se satisfont d’une violence paroxystique, contraignent un pouvoir à la démesure sécuritaire, tacitement réclament une mort d’homme. La figure du martyr est dans leur ligne de mire.
Macron s’approprie le micro, temporise, botte en touche, étire son débat des heures et des heures car il a peur de mourir. Il désactive l’option « législatives » car il ne souffre pas de perdre. N’est pas de Gaulle qui veut, qui se désigne Zeus.
Macron chipe aux militaires leur stratégie de guerre à zéro mort. Des deux rivaux, le monarque ou le gueux, c’est celui qui défiera les balles sans effroi qui raflera la mise de roi, disposera de surcroît d’une légitimité.
Depuis les milliards de décembre, les Jaunes savent qu’il faut casser de la vaisselle pour gagner son bifteck.  L’horizontale reculade d’Emmanuel le Vertical est le péché originel d’une parenthèse quinquennale. Les uns parlent de ressenti, les autres de moyenne statistique. Le malentendu est dans la rue.
Dans le même temps, on barbouille le décor insurrectionnel d’une touche académique, gentiment électorale, d’un scrutin invisible, riquiqui, européen à ce qu’on dit. L’Europe est myope comme une taupe, coincée entre deux Chine ou deux Amérique.
On se soucie des nos petits députés anonymes, apatrides, inutiles, comme d’une guigne. A vrai dire, le grand dessein européen se mesure à l’insignifiant casting de listes de figurants, d’insipides supplétifs  à caser quelque part.

vendredi 19 avril 2019

Marthe et Marie

Dans  les regards mutiques, dans les corps dressés vers le firmament, scrutateurs silencieux de la mauvaiseté du sort, on lit l’éblouissement des hommes d’aujourd’hui devant leurs frères de génie, ces artisans d’hier aux beautés indépassées.
Foule bigarrée, nous sommes au garde-à-vous devant la cathédrale. Aucun maréchal, à masque martial,  ne nous passe en revue.
L’ecclésiale fixité des silhouettes est une prière muette. Le feu ravage l’église de Pierre. Nous sommes pétrifiés. Les braves du feu s’activent, se carapatent, multiplient les exercices d’acrobate. Ils parent au plus pressé, sauvent les trésors d’une cité.
Les figures de Marthe et Marie allégorisent l’incendie de Paris. La foule immobile, dans sa vacance fervente, s’appelle Marie. « Elle a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée ».  C’est le texte de Luc qui le dit.

lundi 15 avril 2019

La nation dans la nuit


On s'interroge sur une identité. C'est fini. Le brasier de la cathédrale nous enseigne ce qu'elle est: un attachement à la beauté, qui brave les temps, qui jamais ne ment. 
Les toits rougeoient, si proche du jour de joie, des cloches de Pâques de ceux qui croient. La flèche de feu splendide a chuté comme une faute d'origine, s'est plantée dans nos chairs hébétées. C'est la nation dans la nuit qui flamboie vers nulle part.

vendredi 12 avril 2019

L'effet Nafissatou

On ne pense jamais à tout. Surtout pas à Nafissatou. Le hasard bouleverse l’ordre des causes. L’impromptu court les rues.
L’effet Nafissatou est un sortilège de mauvaise fée. Une femme de journée d’un palace nouillorquais, un Sofitel merdique, a scellé le destin d’un peuple lointain, a désigné sans coup férir le président d’une contrée vieillotte à bérets surannés.
Nafissatou fit Sarko chef de complot et d’Etat de surcroît. Ledit Sarko s’agita comme il sait le temps d’un quinquennat. Lui succéda un rond prélat à joues de trompettiste. L’onctueux prince à cravate de travers contraignit Montebourg à rendre son tablier. Il propulsa Macron le stagiaire à Bercy, l’installa au ministère. Le bel Arnaud échafaudait un effet papillon. Elles étaient un peu folles, les guêpes. Le futur gardien des abeilles rua dans sa ruche. De toutes pièces, il créa le petit gars du Touquet, l’impérieux Emmanuel de notre survie.
Or il arriva que Benalla s’en mêlât. Ce videur de boite de nuit cogne tout ce qui contrarie le skieur de La Mongie. Il est vu tabasser tout ce qui dépasse dans la rue. En plus des fèques niouzzes, il y a des caméras liberticides partout. Le bon roi Macron somma le peuple de venir le chercher au palais. Benalla inventa les Gilets Jaunes.
Autrement dit, c’est Nafissatou qui fait l’Histoire et mentir les commentateurs. Avec Arnaud et Benalla, elle dispose de vaillants lieutenants. C’est un trio gagnant, bien plus performant qu’un gouvernement.

jeudi 4 avril 2019

On dirait des ours ratés

Dieu est un son, la note absolue, un silence blanc. J’ai quitté l’empire des fautes d’orthographe pour un royaume de fautes de carres. Sur les pentes immaculées, on entend des sons à coucher dehors. La Tarentaise dissimule un malaise. Une musique sale règne sur une montagne belle.
La neige est venimeuse, luisante d’animosité, au soleil de midi. Les gargottes d’altitude créent l’hébétude. J’ai connu l’Arbina, le Refuge, le Bellecôte. Je me souviens d’Extrassiaz, le seigneur du chalet, buriné comme un bandit calabrais.
Du haut du funiculaire, je vois les skieurs inexperts, les quatre fers en l’air. Les glisseurs sont casqués comme des mineurs d’hier. Les troncs des futaies sont entaillés de « gourmands », le long des fissures écaillées. Le pas lourdement cadencé des godasses de ski s’accorde au tam-tam des haltes à tambouille. On dirait des ours ratés, des versions manquées de grizzlis égarés. Je me sauve des sauvageries sans interdit.
Succession d’instants, suite d’éternités. Grand débat et bon débarras. Dans les journaux, je me sens étranger à l’usage des mots. Je ne suis accueilli que dans les livres écrits. Le style universalise l’anecdote.
Les skieurs ironiques sont des populistes russes ou britanniques. Ils se cramponnent à de grandes asperges qu’on appelle des perches. Je regarde les sapins comme des arêtes de colins froids.