vendredi 5 juillet 2013

Le cerisier

Le cerisier rougeoie. Une jardinière s'ébroue sur l'échelle de bois. La vergogne illumine les petits fruits de convoitise. Hélène jette ses doigts dans un feuillage écarlate. On dirait qu'elle tapote la pommette d'une fillette.
Au pays des ciels ardoise, la jardinière toise l'arbre de compagnie. L'été se mesure en quantités de compotier. La cérémonie des cerises évoque une oraison de saison, une prière à voix basse, une toile précise de Balthus.

jeudi 4 juillet 2013

Z'Ayrault de conduite

La môme Batho est débarquée du radeau des écolos. Vogue la Batho ! La chouchoute de Marie-Ségolène - c'était hier - a les joues roses d'une scoute, un caractère d'apprentie guerrière.
Z'Ayrault de conduite. Hollande l'enguirlande. Une femme virée, zéro de retrouvée. Batho est butée. Les femmes sont des ânes. Ont-elles une âme ? La fine Delphine n'en démord pas. Veut se confesser à la presse.
Moche de limoger. Maître Hollande congédie Delphine comme une petite bonne. Solférino n'essuie pas de sanglots. Il fallait un routier qui colle à l'asphalte. Martin du Gers sort des cartons. Le rieur bourgeois du terroir n'est pas un bleu. Malgré la couleur de son costume et les reflets de ses cheveux.

Chien d'arrêt

Ma main de parchemin se refuse au dessin. Elle s'abstient de toute fin. Elle est éblouie par la candeur du papier. Elle cogite, s'interroge sur la hâte.
L'index courbe une phalange sur un pouce, bravement idiot, à figure de madone. Je presse une touche, Bach tente une fugue. Je sonne la musique comme un domestique.
La feuille est une proie qu'on cueille d'un doigt. C'est une peau de première communiante. J'hésite à noircir par peur du pire. Le songe d'un doigt est une rêverie de chien d'arrêt.

mercredi 3 juillet 2013

Transparence et grandes oreilles

L'époque aime le dévoilement des corps, l'éventement des secrets, l'affichage de l'intimité. La République n'est vertueuse qu'à la condition d'une laborieuse transparence. La vérité voisine la nudité. Le devoir d'open space s'impose aux bons esprits.
La société se félicite de n'avoir rien à cacher. On s'étonne de l'émotion causée par les espions d'Amérique. Nos livres sont ouverts. La parole est publique. En démocratie, la transparence délivre des cachotteries de tous acabits. Elle nous préserve du mensonge d'Etat. Elle interdit le camouflage, supprime les exactions de bandes organisées.
Notre République exemplaire se fiche des espions d'Amérique comme d'une guigne. La transparence se joue des grandes oreilles, tombées depuis longtemps en déshérence.

mardi 2 juillet 2013

Nadeau, Flaubert, Papa

J'ai seize ans. C'est un livre long, lourd dans la main, dont le bleu d'origine s'est jauni avec l'ennui. Je l'ai extrait de la bibliothèque de Papa. J'ai subtilisé mon cadeau d'anniversaire, me suis réapproprié "Gustave Flaubert écrivain".  Les éditeurs s'appellent Lettres Nouvelles et Denoël.
J'ai feuilleté ses pages brunies. Le soleil des yeux a brûlé leur papier. A l'amorce du texte, Papa a collé un trapèze de presse soigneusement découpé: "Tout ce qu'on invente est vrai".
Maurice Nadeau, son auteur, est mort à cent ans et des poussières. Papa, son lecteur, est mort avant d'avoir fini d'imaginer le destin d'un corps.
Le missel a vieilli comme l'ocre d'un palais. Sa tranche est balafrée de petites estafilades. Les baisers du temps entaillent la peau du fier volume. L'usure a écorné le bas de couverture. Gustave est intact sur son catafalque.