mercredi 29 septembre 2010

Indigène de qualité

On connaissait "la fabrique du crétin", cette école du décervelage qui perdure au fil des réformes. On connaît désormais "la fabrique du bon Français", ce nouvel atelier de confection d'indigènes de qualité.
Le label "bon Français" de la maison Besson est un gage d'excellence.

lundi 27 septembre 2010

Sur les épaules de De Gaulle (4)

Après l'Appel, il y a le bonsoir de De Gaulle, une sorte de "sacré bonsoir!" à la Claudel. A l'issue du référendum fatal, vécu sur le mode de la roulette russe, l'adieu est irrévocable, pareil à la prise d'habit religieux. "Je cesse d'exercer mes fonctions de président de la République. Cette décision prend effet aujourd'hui à midi". Communiqué à peu de mots. Sublime chant du départ. Chef d'oeuvre absolu. Avant de mourir, de Gaulle longe les eaux d'Irlande, allonge le pas, achève un songe.
On feuillette les archives. On y revoit la cérémonie des conférences de presse. De Gaulle sait son texte sur le bout des doigts. Il déroule un grand récit. Ses majestueuses postures, ses mimiques et sa gouaille ironique, la perfection de sa langue et sa tonitruante réactivité émeuvent comme au premier jour. Il crée un genre: l'opéra politique en solo. Aucun de ses successeurs n'y brillera. A défaut d'images, il faut se replonger dans les magnifiques volumes d'Alain Peyrefitte: on colle la page à son oreille, on entend distinctement la voix de Charles de Gaulle.

Sur les épaules de De Gaulle (3)

Affublé du titre de "grand homme", à l'égal de Zidane, le Lillois d'origine squatte nos consciences. Nombre de vieux tromblons d'aujourd'hui, en leurs années d'écoliers, aux heures pionnières de la télévision, se souviennent de l'énergumène, dégingandé, costumé en militaire, se dressant en majesté dans leur salle en manger. Depuis lors, ils habitent une nostalgie.

Chien sans collier

Il n'a jamais été son mentor. Celui-ci n'a jamais été non plus le premier ministre de celui-là. Juste un petit collaborateur. On a l'impression que François Fillon, collaborateur sans mentor, se cherche une vocation, agite la sonnette de Pôle Emploi.
Bayrou recrute. Les affaires reprennent dans le Béarn. Le concept de "shadow cabinet" a relancé le petit commerce centriste. Il accueille les chiens sans collier, en rupture de meute. Je suis persuadé que Fillon pourrait y postuler Matignon. Depuis le temps qu'il en rêve !

vendredi 24 septembre 2010

Sur les épaules de De Gaulle (2)

De Gaulle a taillé sa République, la cinquième, comme l'artisan peaufine de solides brodequins. Elle a déjà survécu a ses arrières petits neveux. De Gaulle développe dans le durable. Il sait la noblesse du matériau, le cousu main des mots. C'est un bâtisseur de vérité. Il veut le vrai, le meilleur, bien au-delà de sa génération.
De Gaulle a serré la main des voisins d'Outre-Rhin, les a hissés dans l'avenir en rescapés du déshonneur. Il a tiré un trait sur les passés meurtriers.
De Gaulle a vu la Chine conquérante, la Russie renaissante, l'Afrique libre. Ce soldat chef d'Etat a pressenti l'atome dans l'industrie, doté le pays d'une farouche énergie, privilégié le travail des laboratoires. Charles de Gaulle a sculpté la matière de l'Histoire en artiste visionnaire.

Sur les épaules de De Gaulle

Il est notre chagrin d'amour. Ce lecteur de Bergson soignait la forme comme personne. Un guévariste, un maoïste écrivirent après coup de beaux ouvrages de respectueux hommage.
De Gaulle nous a alertés pourtant: "L'avenir dure longtemps". Les joyeux drilles de Mai ont barbouillé de sottes banderoles. Mais "Charlot" s'est échappé de son musée. Au nez et à la barbe de Dany le rouge, le parlementaire de Strasbourg.
En 2010, avec 40 années de cotisation à la postérité, le gothique général a accompli une première demi-vie de gloire posthume. L'homme a travaillé le temps long de la nation. Il a visé l'horizon. L'homme-chêne a vu la Chine. Avant l'Amérique du suiviste Nixon. Avant l'heure, il a vu la Russie millénaire boire le communisme comme un buvard. Nous étions alors sur les épaules de De Gaulle.

mardi 21 septembre 2010

Mémoire des lèvres

Sorbetti, trois balles de glace, colorées d'ocre comme la joue poudrée d'une façade romaine. Arancia e fragola. La gorge est piquetée de lentes suavités. Le fruit dans la nuit est goûté au meilleur de sa gâterie. Une dentelure de chocolat blanc est plantée au sommet, en terre orangée, à pleine chair d'exquisité. La merveille des sens est assise, le derrière en bataille, sur un pailleté de caramel. Place d'Espagne aux figures de pierre peinte: une froide mémoire des lèvres.

jeudi 16 septembre 2010

Des hommes et des hommes

Ils sont Roms, chapardent, volent et cambriolent. Ils sont députés, braillent, vocifèrent, invectivent. Elle est commissaire, sermonne, déraille, amalgame. Il est président, provoque, attise, divise. Il est pape et fait la Manche. Les hommes sont les hommes. Moyens, médiocres, minimes, minables. Ils sont moines à Tibhirine. Pareillement quelconques. Hommes, ils ont un peu des dieux. Ils sont grands.

mercredi 15 septembre 2010

Une vie

La vie d'un homme est une minute d'éternité. On peut détruire un corps, se débarrasser d'une poignée de secondes, sans pour autant meurtrir l'infini. Les mitraillés du temps présent sont des segments d'illimité.

mardi 14 septembre 2010

Machin est mort

Dès qu'une figure connue de notre culture commune vient à mourir, les médias annoncent la nouvelle, parlent de sa "disparition". Chabrol, Fignon, Giraudeau, Terzieff ont "disparu". Pas moyen de mettre la main dessus. Nul ne songe d'ailleurs à partir à leur recherche. Il semble qu'on ait renoncé à les retrouver.
Dans le même esprit, nécrologiquement correct, le carnet du jour de la grande presse informe des "décès", mot de médecin légiste. Ceux qui croient en Dieu usent également de ce terme sans majesté. J'en suis surpris car "la résurrection des décédés" n'appartient pas vraiment au vocabulaire des Saintes Ecritures.
Bref, tout se passe comme s'il convenait de s'interdire de désigner la mort par son nom. "Machin est mort" est une phrase taboue.

Chabrol

La gabegie de pellicule dont Chabrol a usé montre la rapacité, la veulerie, la flagornerie d'une bourgeoisie moisie, nourrie de Rotary et de grand ennui, étriquée dans son costume de province. Le fils d'apothicaire filme les menteries ordinaires des notables à dessous de table. Dans les salles de cinéma, Chabrol brille auprès des moroses possédants qu'il dépeint sans tendresse.
La bourgeoisie jouit à se voir démasquée, se plaît au spectacle de ses propres turpitudes. Elle est démangée par le ressentiment. Elle aime désigner de son gros doigt la bassesse du rival de salon. A quarante ans, sous Pompidou, Chabrol a l'âge de ses personnages. Il se compare aux godelureaux de son enfance. Il exprimera alors sa rage d'en découdre comme jamais. Il se saisit du flambeau du fils de famille tenaillé par l'envie. Il fabrique des images, raconte de sordides histoires destinées à tordre le cou de ses ennemis. Il se venge du temps des culottes courtes. Jean Yanne est sublime en Sarkozy garagiste. Stéphane Audran est un phantasme de pharmacien. Chabrol exhibe sa perversité de grand salaud au pays des petits salopards. "Le Boucher" et "Que la Bête Meure" sont ses plus beaux coups de gueule.

lundi 6 septembre 2010

Jean du voyage

Il erre d'un plateau de télévision à l'autre. Il bivouaque dans les magazines. A chaque rentrée littéraire, il squatte les médias. Pas moyen de s'en débarrasser. Hortefeux baisse les bras. Il est tanné comme un bohémien des beaux quartiers. Refoulé aux frontières, il paresse au soleil dans une crique grecque, sur une plage corse. A "Semaine Critique", il s'est montré caustique, clouant le bec à Minc, s'encanaillant avec Mélenchon.
Bref, Jean d'Ormesson nous balade à sa guise. Il converse avec Chateaubriand, tutoie Dieu, interroge les galaxies. Il campe à l'Académie, va sa route de gitan. Il poursuit sa vie nomade dans la lumière des médias. Jean du voyage ne fait pas son âge.

jeudi 2 septembre 2010

Menterie

M. Baroin évoque des hausses d'impôts. Sous présidence Sarkozy. Impensable. M. Woerth est intervenu pour la médaille honorifique de M. de Maistre. Pas possible ? Si. Le ministre a balayé d'une phrase ses premières dénégations. Mme Aubry a saisi la justice pour évacuer un campement de romanichels dans son fief du Nord. Galéjade ? Non, c'est écrit dans le journal. M. Bayrou dit un bien fou de M. Fillon. Deuxième degré d'un agrégé des universités ? Pas du tout. C'est le fond de sa pensée girouette. Le grand homme du Béarn est d'ailleurs l'inventeur du mot "mensongeur" qui lui va comme un gant.
La menterie fait partie du paysage politique, tous partis confondus. Tout le monde s'habitue aux messages de fausseté. La vérité semble être un discours de sainteté, inaccessible au commun des politiciens. Le temps des enfants de choeur est révolu. Pierre Mendès-France ou Raymond Barre appartiennent à des espèces républicaines totalement éradiquées du terreau national.

mercredi 1 septembre 2010

L'homme aux cheveux d'or

C'est la rentrée. On a troqué le rosé pour la morosité. Blabla, piapia, galimatias des rusés politiciens. La cité retrouve ses marques: publicité mensongère sur toutes les étagères. On se bourre le crâne d'un marketing édifiant. On aura l'hiver pour s'y faire. On grelotte d'avance.
Au dernier jour d'août, un champion a plié le genou. Laurent Fignon est sorti du rang. Un grand monsieur courageux stoppe un instant la veulerie ordinaire. Il immobilise la gloire de l'été. L'homme aux cheveux d'or a magnifié le métier de Poulidor. Cet homme debout sur sa machine n'a pas courbé l'échine. Il meurt à mi-vie, sans peur ni envie. Il parle aux hommes tellement mieux que les bavards du forum.