vendredi 28 février 2014

L'autoportrait de Gustave

J'ai fini La Tentation de saint Antoine. C'est un machin qui ne ressemble à rien. Flaubert l'a désossée trois fois avant d'être satisfait. J'ai lu de manière décousue. J'ai haché mes visites à l'ermite.
Flaubert hallucine, peint l'abîme, s'enivre de chimères. Il s'étourdit de fantasmagories. L'anachorète ne tombe pas du ciel mais d'une toile de Brueghel.
Antoine orne un mur à Croisset, dans le dos de Gustave, comme une photo de mairie. Sous la dictée du saint aliéné, Flaubert rédige une vision du monde, un conte oriental saturé de détails bibliophiles.
Il juche les dieux des hommes sur son podium. Les fait mouvoir comme autant de mannequins de sa collection d'hiver. Flaubert impose un train d'enfer au ballet des religions.
Il est le couturier des stars de l'Histoire, le façonnier des divinités de l'Antiquité, l'artificier d'un défilé d'idoles mortes. A la fin, Antoine n'est tenté par rien.
L'homme du désert se terre dans la matière. Flaubert bricole une sorte de son et lumière testamentaire. Il nous tanne avec son moine. Antoine est l'autoportrait d'un Gustave en panne.

jeudi 27 février 2014

Abdelwahed

Dans la boulangerie, à l'angle, Abdelwahed claudique. Il me talonne dans l'escalier. Lentement, nous nous attablons, près de la fenêtre, vue sur Le Printemps.
J'agite un café dans un gobelet. Abdelwahed aime l'endroit pour s'asseoir. Il a prié à la mosquée. La salle d'étage est appréciée des jeunes filles asiatiques.
Abdelwahed parle du bled, d'Itzer et de la misère. Il se félicite de la pluie. L'esprit vagabonde à sa fantaisie. Témoigne de séquelles accidentelles. Je suis sourd à ses trous de mémoire.
Il ressasse un récit. Il tend ses doigts vers le ciel. L'aigle du désert se pose sur l'épaule. La parole illumine sa prunelle. Abdelwahed raconte, invente une proximité au monde. Il s'instruit de science, converse avec Serres, range une pensée dans un cahier orange.
La piété d'Abdelwahed se lit dans les bouffissures d'une figure. Il regarde les ruades de la rue, s'étonne des passants possédés des démons. Nos trottoirs se séparent. Je suis comblé de ses pâtisseries au miel.


mercredi 26 février 2014

L'éclat d'une robinetterie

Ils sont chefs d'un tas d'or. Le calife de Kiev chiadait l'éclat de sa robinetterie. La loterie de la mort effraie les brutes de pouvoir. L'argent témoigne du désarroi des rois. Ils sont voleurs, faute d'autres valeurs.
La cupidité fabrique une légitimité, invente une immortalité. La richesse est une stratégie d'ivresse. Ce vaurien d'Ukrainien n'était maître de rien. Il terre son crime en Crimée.
La volonté de pouvoir étanche une soif de dollars, satisfait une immédiateté, bricole une éternité. Elle ne se borne pas aux seules tyrannies, folles de robinetterie.
Le despote empêché des démocraties est aussi taraudé par l'envie. Il s'enrichit en catimini. Il succombe à la tentation sur la barricade de la nation. La corruption est le nom d'une passion, de la possession d'un démon. Elle saisit les pontifes, hommes craintifs.



lundi 24 février 2014

Saint Martin

Sur ses skis graciles, Saint Martin défie le ciel. Ses lattes d'athlète fouettent la neige. Il tend sa médaille au pauvre pays qui mendie vaille que vaille.
Martin Fourcade tranche sa pelisse, donne un manteau à l'homme qui n'a rien sur le dos. Le pays s'emmaillote du drapeau.
La nation en haillons acclame le patron du biathlon. Elle s'imagine un grand dessein qui soit un carton plein. L'embellie du champion catalan est une offrande au pays qui quémande.

Modeste et Pompon

Il fait beau. C'était la saint Modeste comme aujourd'hui, une date qui s'entête à l'heure où vient la nuit.  Il fait beau. Il était bon. Pas meilleur. Bon tout court, bon du coeur. Il fait beau. J'en ressens le bienfait sur ma peau.
Les heures ont passé à côté d'un radiateur. La vie va vite derrière la vitre. Il regarde de biais, jette une main sur la rosée du matin.
C'est lundi. C'était mardi, à une moitié de décennie. Je me remémore la mort. L'homme cachait son visage derrière un album. Il bornait l'horizon, barricadait sa maison derrière Modeste et Pompon.
La nuque a flanché. Je me penche. C'était dimanche. J'ai baisé sa joue. J'observe un cou rougi. Il est temps de cueillir un sourire. De se recueillir avec les lèvres.
J'erre sur la terre à la recherche d'un rire. J'ai dans la bouche ce goût d'élixir. Je tâche de ne pas mentir.

vendredi 21 février 2014

On réenchantera les trottoirs

S'affole le destin des roitelets d'un patelin. On joue des coudes pour être chef de bled. On bourre les crânes, à défaut des urnes.
Les municipales chamboulent la face de Pierre ou Paul. Le scrutin d'un dimanche les convainc d'importance. Le candidat serre des doigts. Il baise la pommette des fillettes. La bourrade dans le dos vaut pour baisse d'impôt. On discutaille de la grisaille et de la racaille. On ne va pas se fâcher sur la place du marché.
On vendrait sa mère pour une mairie en pierre. La démocratie nous préserve de la barbarie. On votera dans les villes aux prochaines jonquilles. On noiera ses déboires dans un bulletin d'isoloir. On réenchantera les trottoirs, collèges et espaces verts.

jeudi 20 février 2014

Envie de Pompidou

On est mangé par le temps, démangé par le ressentiment. Le Finistère est un bout d'Angleterre. Par ces vents fous, j'ai pensé à Pompidou.
La politique s'est arrêtée à Pompidou comme la peinture au Lavandou. L'homme aimait l'auto et les mégots. La poésie et l'industrie. Il se méfiait des grands mots. La pudeur était sa demeure, un for intérieur, une parole d'honneur.
"Ne pas emmerder les Français". Il s'était fixé un beau projet. J'ai la nostalgie du chef érudit, du normalien sachant écrire, des fils d'instituteur à vertus rares. Pompidou a souffert le martyr.
"Dans notre famille, on ne se couche que pour mourir". Quarante ans qu'il nous manque, qu'on nous flanque au balcon des premiers communiants, que font long feu des petits morveux sans grand sérieux.
Pompidou a vingt et un ans. Il griffonne à Pujol qu'il est tenté par l'opium. J'aime Pompidou, compagnon de Poulidor et des sons du terroir. Il est facile dans les cols, à l'aise en Mai qu'il démêle, collectionne Staël. Il est désinvolte, brillant, rude au mal.
Le natif de Montboudif jamais ne s'imagina pontife. Pompidou l'épicurien n'a pas voulu son destin. De Gaulle le sort du doux exil Rothschild. Il rédige à sa droite. Ses songes d'enfant se moquaient d'une cabane de président. Il était à mille coudées des zélés forcenés d'Elysée.




mercredi 19 février 2014

Le chagrin des parpaings

Je suis sauf à Roscoff, loin des yeux brefs, tout entier dans le vif. J'entends les mouettes couiner. La mer siffle son leitmotiv de locomotive. La mer est agitée d'oiseaux englués dans trop d'eau.
La terreur crée la prière. Les yeux de vent cinglés se sauvent du regard des dieux. L'homme fait la guerre parce qu'il mime la mer. Ses détonations sont la langue d'une nation. La vague ploie sous sa loi, fracasse la terre de face, blanchit la pierre d'un fou rire de chiennerie.
Il ne se passe rien avec une précision d'horlogerie, à pas millimétrés, sans vouloir heurter l'éternité. Les fronts bourrus sont des statues à chaque coin de rue. Les enclos paroissiaux délimitent un ciel haut.
Je n'attends rien. Sauf la splendeur. La vague ratisse l'infini, compte et recompte jusqu'à dix. Veto du granit. Locquirec et ses criques.
Bouillasse et bouillons. Vase et vagues. Une pluie fine taillade les pommettes, perce le squelette. Le ciel et la mer joignent leurs doigts d'ardoise. Les hommes meurent sans un stock de douceur.
Vent tombé. Silence dégringolé sur une mer apaisée. Roches et varechs sont des signes celtes. L'aigrette remue le sable avec des pincettes.
C'est l'heure où l'eau se froisse. La mer est trouée comme une mémoire millénaire. Un climat punitif fronce le relief des visages. La pierre a les yeux rougis par la pluie. Les hommes partagent le chagrin des parpaings.

mercredi 12 février 2014

L'Europe de la valetaille

Les nations hésitent sur le chemin d'une fédération. Jadis elles guerroyèrent jusqu'à leurs derniers fils. Cahin-caha, l'Europe s'ébroue, vote en tas, masque un malaise à sortir d'une genèse.
Le Vieux Continent mêle son sang, ne régénère que le ressentiment. La frasque du Latin contrarie la rigueur du Germain. L'Europe peine à touiller ses peuples en une goulash potable. On ment sur les condiments. Les chefferies des pays pratiquent l'hypocrisie à leur fantaisie.
Morand: "Je ne conçois l'hexagone qu'inscrit dans la sphère" (Venises). C'est le style d'un cosmopolite. Si le monde a sa figure de géométrie, l'Europe se dispense de symétrie. On y tasse les nations dans une improbable géographie. Nos champions de pouvoir n'imaginent leur terroir qu'encadré dans un fichu bazar.
Il y a nécessité à s'agréger pour mieux peser sur l'humanité. Le grand format d'un vivre ensemble constitue l'horizon ultime d'une mémoire meurtrie. On taille XXL. Pas de plan B.
Ce genre de blabla émeut la piétaille d'isoloir. Or les candidats au sacre sont des deuxièmes couteaux, des chevaux de retour, des perdants récurrents.
L'Europe est le lot de consolation des recalés du suffrage local. Ces habitués de la tasse électorale sont parachutés à Strasbourg. Le Vieux Continent pèche par la pauvreté de son recrutement.
Ce choix politique par le bas mesure le degré de croyance des partis en l'utopie communautaire. C'est pourquoi on y désigne les plus médiocres, on y délègue de pâles doublures. L'élection rime avec désaffection.
Car Strasbourg est un trou, un goulag, une sorte de Sibérie. On y châtie les petits. Hors sol, on y dépérit. L'Europe douche les ambitions. La carrière nécessite un terroir. Les ténors fuient le calamiteux placard à tocards, n'en veulent pas pour un empire. On y case la valetaille.
On apprécie la distance entre les choix du moi et les professions de foi. L'exil rhénan fait la démonstration qu'on nous ment éhontément depuis longtemps.


mardi 11 février 2014

La grande reine

La musique est impérieuse comme l'aurore. Je me libère les yeux, des tas de mots sur mon genou. Je regarde un pan de mur comme la figure de rien.
Je me donne à Bach comme une première communiante cède à la prière. Le prélude en do mineur rompt l'habitude à la clameur. Il impose une loi d'addictive musicalité.
Le son abolit l'horizon. Il efface l'espace d'un coup d'épaule. Il déborde en rugbyman mélomane. La musique hachure la carte du corps, s'aventure en territoire intérieur.
Bach cloue le bec au prurit de pointe Bic. La musique règne d'un coup de balai. La sorcière anéantit la matière, pratique l'hypnose des choses.
Si la bicyclette, c'est la petite reine, la musique c'est la grande reine. "Roi des rois" disait Staël des tableaux de Velasquez.

Mais ça, c'était avant

La componction d'Obama crève l'écran de télévision. Le délié sorcier de Washington accueille un petit président emprunté, pendu à ses basques.
Le mulâtre américain condescend à faire copain copain. Un Nobel de la Paix offre l'hospitalité au guerrier de l'année. Le roitelet d'Europe bombe un torse de vanité. Le brave provincial emboite le pas du chef impérial. Il est serré dans son vêtement.
L'Amérique rime avec numérique. L'Europe n'évoque qu'une succession de flops. Dans les laboratoires de San Francisco, le tonton d'une vieille nation s'interroge sur les ressorts de l'innovation. On ne fonde pas Twitter par décret. On ne crée pas Google en partenariat avec l'Etat.
La liberté donne un coup de fouet à l'inventivité. Le dollar est partenaire de poker, jamais l'adversaire à faire taire.
Les élites de toutes les nationalités s'agrègent dans la Silicon Valley. Sur l'agenda, l'homme d'Etat a coché d'une croix le pélerinage sur la tombe de Steve Jobs. Gloire au capitalisme apatride.
On ne s'agenouille pas impunément devant les dieux d'Amérique. A trop baisser la nuque, on consent à vivre en laquais.
I have a dream. Nous fîmes un rêve, nous aussi. Un général dégingandé tenait alors la dragée haute à Roosevelt, Eisenhower, Kennedy, Johnson, Nixon. L'indépendance et la croissance définissaient la politique de la France. Mais ça, c'était avant.

lundi 10 février 2014

L'au-delà

Je romps tout commerce avec Flaubert. Le récit d'artiste nécessite une forme olympique, une plénitude physique. La beauté requiert un corps entier. L'art ment s'il manque de corps.
Ma bouche endolorie suffit à distraire une sensibilité, interdit d'apprécier le dentelé policé du texte ouvragé.
On lit mal dans un lit de malade. Sans grosse santé, on rate la nécessité du sacerdoce. Le mal éloigne du missel. Mon petit volume est fermé comme un visage d'amertume.
Il est fermé pour cause d'inhospitalité. Je sens, donc je suis. Je ressens, donc je m'identifie.
Je songe au livre, à son sourire d'orange, à ses quartiers tranchés, au sang vaillant des phrases enrubannées. J'y songe comme à la sortie d'un mauvais pas. J'y songe comme à l'au-delà.


vendredi 7 février 2014

Cruchard et son art

Flaubert, c'est de Gaulle. Il met les points sur les i, défend mordicus sa noble fantaisie, sacralise les intérêts de son pays.
A Sainte-Beuve qui écorche Salammbô, il expédie vingt beaux feuillets. L'Hercule justifie chaque virgule. Il déjoue la mitraille, détaille son colossal travail. Cette lettre est un soleil d'orgueil, un modèle de panache, un sublime baroud d'honneur.
Le feu de Flaubert émeut. Flaubert force Sainte-Beuve à se décoiffer. Le fin lettré est pétrifié sous son fouet. Mea maxima culpa.
Flaubert est trop loin, situe son art trop haut. L'oncle Cruchard monte sur son char. "On ne risque de corrompre personne quand on aspire à la grandeur". Flaubert veille en cerbère sur sa colère.

jeudi 6 février 2014

La côte sauvage

Gallimard. Le rouquin, qui jongle avec les bouquins, règne en son jardin. J'identifie le muet visage à peau blême de l'altière caissière.
On se salue sans faire une ride au silence. L'homme est svelte, pas jeune pour autant. La femme est fardée comme la Roberte de Klossowski.
Je songe à un troisième larron, mort d'un chagrin du sang, homme à bedon, le plus érudit de la maison. Il m'enseigna une certaine joie. Je lui dois la manière de caler un corps au format du livre d'art.
Les hommes raccourcissent comme les jours. Les livres condensent du temps sur des étagères de poussière. Le lieudit librairie se prête au recueillement des yeux.
J'abrège les courtoisies. Dès l'entrée, je dégringole l'escalier spiralé. Au rayon des livres miniatures, je remue mes souvenirs d'alphabet. Après Hugo, avant Ionesco. Je saisis Huguenin dans ma main. Le dernier livre d'Hallier s'appelle Je Rends Heureux. A cause des initiales de Jean-René Huguenin, son copain de Tel Quel.
L'aimé de Gracq et Mauriac a laissé un roman et un journal, tassés joue contre joue, égarés au rez-de-chaussée, au bas de l'escalier. Pour la Bretagne, mieux qu'un guide, j'ai besoin de relire des pages de La côte sauvage.

L'Europe foire

Hollande exprime peu de sympathie pour Merkel et Cameron. Il dédaigne Rajoy, exècre Barroso. Les politiciens se regardent en chiens de faïences.
L'Europe est une utopie détachée de nos rêveries. C'est un club de faux amis. La concorde n'est pas dans nos cordes. La franche camaraderie n'a pas succédé aux tueries. Les saignées du passé n'enseignent que le ressassé. Les nations noient le poisson dans un poker menteur d'arrière-boutique.
Dans son Eloge des frontières, Régis Debray met le doigt sur la haine de soi. "Quand on ne sait plus qui l'on est, on est mal avec tout le monde - et d'abord avec soi-même" (Folio, page 52).
L'Europe organise la libre circulation de la violence: circuit de marchandises, toboggan de capitaux, transit des hommes. L'Europe s'avachit dans la mélancolie. L'Europe foire, allume ses derniers pétards.

mercredi 5 février 2014

Moi et mon mal

Le mal batifole sous l'émail. La mâchoire est un gong, une caisse de résonance où vagabonde la souffrance. J'ai la sensation d'une dentition aux terribles allitérations.
J'ai la bouche pleine de fièvre. J'absorbe de la purée de neige. Je dissous des pilules dans de l'eau qui pétille. Le médicament se moque toujours du patient. Le mal se conjugue au présent. Un présent qui dure, qui s'endure jusqu'au futur.
Je quémande le sentiment du rafistoleur de quenottes. Le docte officier à sourire carnassier montre ses dents de financier. Il me trimbale, moi et mon mal, jusqu'aux calendes grecques. Il se soucie de mes ennuis buccaux comme d'une guigne.
A la Pitié-Salpêtrière, l'atmosphère évoque une criée de bord de mer, s'apparente au bourdonnement d'une salle des marchés. Les portes claquent comme des dents malades. L'écran affiche les numéros gagnants. C'est le mien - mais pas tout de suite - qui clignote.
L'urgence est une récompense. Je déplie mon squelette pour un oscar de starlett. C'est une jeune toubib, Sherry-Lynn, qui m'exhorte à prononcer le mot "cerise". Ma dent n'est pas l'aimée des fées: elle est nécrosée.


mardi 4 février 2014

La photo fait des fautes

J'ai voulu cette photo. L'ai convoitée d'arrache-pied. C'est une carte postale frontale qui touche dans le mille de la prunelle. Je l'ai sous les yeux. Je l'observe à qui mieux mieux.
Le visage n'est pas domestiqué dans un cadre écaillé. L'homme franchit la borne. Il a des ailes, des battements de cils pour exil.
C'est une photographie d'avant ma vie. C'est un cliché d'époque, opaque et léché. Le hasard en fait un regard. Je suis dans l'axe de sa face, de profil à ma table de fils.
J'ai voulu cette photo. Je l'ai voulu comme on mendie dans la rue. Je l'ai trop vue. Elle me cache les miennes, mes images souveraines.
La photo fait des fautes à tous mes mots. J'ai engrangé d'autres regards qui ne tiennent qu'à mon art. Je veux revoir les images d'avant la mort qui sont noyées dans mon corps.

lundi 3 février 2014

Les cartes postales

Il est mal rasé comme un bobo décomplexé. Ses déplacements le montrent souriant, hédoniste, jouisseur. Il applaudit Carla, décore le maire d'un patelin ici ou là. Il se promène en son vaste domaine.  Il plagie Raffarin, maître en fragments finauds. "Là où la mer est passée, elle revient".
Je crains que le bonheur désinvolte du flâneur n'insupporte le travailleur. Il casse l'ambiance de souffrance. Sarkozy se conduit mal avec ses cartes postales.
Sa décontraction démoralise un peu plus la nation. Sa liberté de bord de plage, sur fond de ciel bleu, blesse un électorat soucieux, laborieux, malheureux.
La posture de Sarkozy accrédite l'injustice comme une seconde nature. C'est un ratage de communication dans les grandes largeurs.
De surcroît, sa fantaisie hautaine à dédaigner la primaire s'apparente à une stratégie de guerre. Elle favorise ce qui divise. Elle émiette la droite.
Elle souligne un penchant suspect à refuser l'égalité. La nécessité d'un passe-droit révèle une fragilité. L'exigence de facilité entache sa légitimité.
En revanche, il jouirait d'une posture de grand seigneur à se caler sur la même ligne de compétiteurs que ses anciens "collaborateurs".
Refuser de rentrer dans le rang l'expose au pari risqué du plébiscite sondagier, lourd de ressentiment.