mardi 30 août 2011

Plagiat de journaliste

Le journaliste chaparde l'information. Le voleur de scoops n'est jamais qu'un moderne voleur de poules. Il s'approprie une denrée sans fils barbelés. Le journaliste veut s'extraire de sa condition scribouillarde pour briguer la gloire d'écrivain. Or écrire pour de vrai est une autre paire de manches. Céline avertit les apprentis: "Avoir la force. Ne servir que sa vision".
C'est pourquoi les journalistes, démangés par le statut d'au-dessus, se désolent des seuls moyens du bord. Ils sont contraints de vitaminer leur plume, de sous-traiter "la force" et "la vision" à des costauds de l'écriture. Ecrire n'est pas un loisir de plage. D'où la nécessité du plagiat.
Snobisme aidant, les traducteurs d'auteurs américains sont les premiers pillés. PPDA et Macé-Scaron sont sensibles aux travaux des héritiers de Saint Jérôme, made in USA. Ils recopient.
D'autres plus instruits, journalistes du dimanche, chipent le travail d'obscurs universitaires pour mieux se prévaloir de la pensée d'un génie (Minc écrivant sur un grand philosophe, par exemple).
Au total, Hemingway ou Spinoza ne craignent pas grand chose. Les journalistes aux textes un peu "précipités" (Cyrus Vance) peuvent dessiner toutes les moustaches qu'ils veulent aux Joconde de leur choix, la littérature s'en moque éperdument.

lundi 29 août 2011

Tout faux

Faux départ. Bolt a jailli trop tôt de ses starting-blocks. Le roi du sprint est disqualifié. Fausse alerte. L'Irène de Manhattan n'était qu'une grosse tempête.
Faux semblants. Il fallu une sorte de farandole finale des chefs de La Rochelle pour occulter leur haine mutuelle. Beaucoup d'Aubry pour rien. Fausse joie: Khadafi reste introuvable. Tripoli regorge de trous de souris. Faux calculs: les niches fiscales ont du plomb dans l'aile.
Bref, jamais week-end de rentrée n'a vécu autant sous l'empire du faux.

vendredi 26 août 2011

Le précurseur

Steve Jobs n'était pas seul. Il avait un complice dont le nom a déserté notre mémoire. Bill Gates n'a pas créé de toutes pièces un logiciel d'exploitation: il l'a subtilisé à un illustre inconnu.
Jésus de Nazareth, lui-même, a délivré son message en emboitant le pas de Jean Baptiste, dit "le précurseur".
Les princes du savoir-faire figurent dans les livres d'histoire. En revanche, il est rare que les vrais poètes du savoir y soient exhumés de l'oubli. Le génie est une chose. Le marketing, une autre. La publicité de l'un recouvre l'anonymat de l'autre.

jeudi 25 août 2011

Le fumeur

Si le fumeur n'existait pas, l'Etat français s'empresserait de l'inventer. En effet, l'amateur de tabac possède le profil idéal de la victime émissaire. Il cumule tous les handicaps. Il mérite un châtiment exemplaire. Il doit payer pour son péché. L'addiction à la nicotine lui fait courir le risque d'une mort prématurée, l'expose à la vindicte populaire. Elle ruine ses économies autant que sa santé.
Ainsi l'Etat s'en donne à coeur joie. Il le taxe à qui mieux mieux, le ponctionne sans vergogne comme on humilie une tête de Turc. Il sait qu'il convient de le gruger vivant car sa durée de vie est limitée, se situe en-deçà de la moyenne.
Un fumeur mort dans la force de l'âge rapporte gros. Pas de retraite à verser, pas de frais médicaux d'une longue vieillesse. La collectivité nationale économise sur le dos du clopeur impénitent. Le fumeur qui achète cher son poison est une affaire en or pour un Etat à morale suspecte.

mercredi 24 août 2011

Les dames patronnesses

Le lobby Bettencourt a exercé son influence avec succès. C'est de bon coeur que le gouvernement lui a chipé sa mirobolante idée. La clique de nababs du CAC 40 a imposé son message de générosité: saigner les riches.
L'aréopage de pétitionnaires d'impôts nouveaux est libre de verser une obole en prime, un super bonus au budget de l'Etat. Ces dames patronnesses de la grande entreprise soignent leur bonne conscience à leur fantaisie. En revanche, on s'étonne qu'elles s'expriment au nom d'un collectif de "riches", moins fortunés par le sort. Les revenus des "petits riches", des "riches d'en bas" sont déjà ponctionnés à qui mieux mieux. Leur sens de la solidarité est sollicité à l'excès.
Cet amalgame entre gens aisés et nantis sème la confusion dans les esprits. L'économie du pays mérite mieux que ces exercices de contrition d'une rare démagogie.

mardi 23 août 2011

Une sorte de "triple A" citoyen

On ne saura finalement rien du huis clos du Sofitel de Manhattan. Le feuilleton Strauss-Kahn est déprogrammé de l'antenne. Reste qu'on s'est intéressé comme jamais au fonctionnement de la justice des hommes.
La femme de chambre a péché par manque de crédibilité. Pareille faiblesse motive l'abandon des poursuites.
A vrai dire, je suis étonné par les présupposées psychologiques du procureur sur la nature humaine. Tout se passe comme s'il cherchait à identifier les contours de la personnalité de la plaignante. Avec, par hypothèse, l'idée réductrice que l'individu ne jouit que d'une seule identité, reproductible à chaque moment de sa vie. La femme du huis clos de la suite 2806 doit être considérée comme un bloc granitique, invariable d'un bout à l'autre de son histoire personnelle. Faute de quoi, sa parole est fragilisée.
Or la vie nous enseigne que la nature humaine est autrement plus complexe. On mutile l'individu en se prévalant d'une hypothétique unicité ou permanence identitaire. Je suis plusieurs. Nous le sommes tous. Menteur un jour, loyal et franc un autre, violent en certaines circonstances, doux à l'extrême l'instant d'après. Le pluriel du mot "circonstances" travaille les identités multiples de la personne humaine. On ne parle d'homme que bariolé dans son identité d'Arlequin. A cet égard, il convient de relire l'oeuvre magistrale de Michel Serres.
Nafissatou Diallo ment à l'occasion, quand bon lui semble, à sa fantaisie. Dominique Strauss-Kahn sans doute aussi. Autrement dit, le mensonge est l'une des facettes de l'erreur dont la sagesse antique nous rappelle qu'elle est humaine, par excellence. Perseverare diabolicum. Justement, on ne ment pas toujours, on ne trompe ni ne se trompe constamment.
C'est pourquoi on doit s'interdire d'exclure tout discours de vérité de la plaignante au seul motif de dissimulations antérieures.
De surcroît, on peut s'interroger sur la légitimité du passé pour juger du présent. Le temps immédiat, dans son instantanéité, est coupé de toute mémoire. La vérité ne se réclame pas de la logique infantile d'un quelconque système à points. Elle ne cumule pas les bonnes notations de conduites antécédentes. La vérité ne peut être assimilée à une sorte de "triple A" citoyen.
Bref, l'exercice de la justice américaine, ainsi exhibé à la face du monde, révèle sa connaissance rudimentaire des ressorts humains. J'en ai froid dans le dos.

La politique incantatoire

La chefferie politique sollicite les suffrages du peuple par le truchement d'incantatoires slogans. "Yes, we can". C'est bien joli, mais pouvoir quoi ? Obama ne se donne même pas le mal d'achever sa phrase. Il s'exprime de manière hypnotique et quasi signalétique. Ce degré zéro de la raison discursive s'apparente à la ritournelle sommaire des chansons populaires. Elle renvoie, de surcroît, à une sorte de méthode Coué. Le pouvoir parle fort et péremptoire comme l'enfant dans le noir pour vaincre sa peur.
Sarkozy termine sa phrase: "J'irai chercher la croissance avec les dents". Reste qu'il est tombé sur un os. La crise lui a rogné les crocs. A vrai dire, Obama et Sarkozy, leaders emblématiques du monde contemporain, ont subordonné leurs travaux au seul volontarisme des mots. La réalité exige davantage. Certes, les crises à répétition - subprimes et dettes souveraines - ont déjoué leurs artifices d'apprentis sorciers. Mais un projet politique, digne de ce nom, est tenu de surplomber les vents mauvais de la conjoncture.
Sans quoi, tout grand dessein se réduit au creux discours. Dès lors, nos chefs d'Etat publicitaires détricotent en fin de mandat ce qu'ils ont tissé dans l'euphorie des débuts.
Méthode Coué, absurdité et stérilité scandent le temps politique, mesurent l'étendue des occasions perdues.

lundi 22 août 2011

Une chanson d'autrefois


En bordure de bordel
La vie n'est pas plus belle
Qu'une verte poubelle

En bordure de bordel
La vie n'est pas plus dure
Qu'un monde de peinturlure

En bordure de bordel
Se croisent les bretelles
A l'angle d'une épaule

En bordure de bordel
La vie n'est pas plus sûre
Qu'un local à ordures

En bordure de bordel
Les hommes en Marcel
Vivent à fond les décibels

En bordure de bordel
Les femmes du grand Arthur
Se perchent sur des chaussures

En bordure de bordel
Les sexes les plus espiègles
Se mêlent ou se démêlent

En bordure de bordel
L'amour y court toujours
Le risque du faux jour


Vigne vierge

Ces doigts écarquillés sur la pierre lézardée sont des feuilles de vigne vierge, luisantes d'un pieux désir. La gloire d'été suspend le temps. La nature, d'avant septembre, à l'heure des coloris décatis, crie sa splendeur de bête fauve à luxure consentie. Soir ostentatoire de ses mille plaies dentelées.

dimanche 21 août 2011

Le dérouleur

Nous avons cheminé d'une échoppe à l'autre, de Casa à Ma Maison, de La Foirfouille à Brico, dans la joie des neuves marchandises. Tournée des grands ducs. Nous avons erré parmi les rayons saturés d'ustensiles. Le désir se vautre dans ces travées de convoitise.
Nous avons comparé les mérites des "dérouleurs papier toilettes", touché, soupesé, brandi les majestueux bidules, froncé nos visages au voisinage d'un grand mystère.
L'été meurt dans un long cri bleu. Stridente hémorragie. On laisse mûrir la réflexion comme une gerbe de blés blonds. On quitte le beau Brico, la conscience égarée dans les abîmes du doute. L'art ménager nous donne du fil à retordre. Il est loin le bonheur des trouvailles. Nous avions acquis, sur un coup de tête, sans barguigner, la première toile venue d'un peintre cosaque.

vendredi 19 août 2011

Un art

Je trouve que Jean-Hervé Lorenzi, brillant professeur et universitaire de renom, pousse le bouchon un peu loin en proclamant que "la politique économique doit retrouver son statut de véritable art" (Le Monde daté du 20 août ). Que l'exercice du pouvoir et la mise en oeuvre des enseignements de la science économique nécessitent du doigté et de la subtilité, je n'en disconviens aucunement. En revanche, je m'insurge contre un label artistique - le mot "statut" me sidère - attribué aux valeureux Trissotin de notre quotidien.
L'excès du propos dévoie le sens d'un mot emblématique. L'art relève d'une pensée humaine à son sommet, touche à la beauté du monde. Dans les interstices du même journal (Le Monde daté du 20 août), rubrique carnet des décès, on lit cette superbe phrase de Leos Carax: "Je crois que la beauté n'est pas autre chose que l'expression du fait qu'une chose a été aimée". Bref, l'art exige qu'on se garde de galvauder sa haute signification. L'économie n'est pas la musique. La politique n'a rien à voir avec la peinture. La politique économique ne voisine pas avec la poésie.
La justice des hommes se nourrit de la justesse des mots. Albert Camus a écrit quelque chose d'approchant.

mercredi 17 août 2011

Le porte-avions

La poubelle est une verte compagne. Elle sympathise avec le clochard des aurores, la pauvre hère des noirs trottoirs. Le veilleur de territoire, coincé entre banc public et déchetterie, s'est levé d'un bond pour exhiber sa trouvaille de l'été: la maquette en plastique d'un porte-avions d'Amérique.
Il s'approprie le jouet, l'accueille dans sa crasse, l'installe entre vin mauve et pièces jaunes. L'objet pivote dans sa paume. L'homme sourit comme s'il domestiquait un oiseau. Le rêve d'un enfant a trouvé son capitaine.

mardi 16 août 2011

Le stress des fourmis

La croissance a rogné les dents du président. On ne l'apprivoisera pas comme ça, même avec des crocs d'animaux. Nous rêvions de triple galop. Or nous n'héritons que d'une croissance zéro. Du coup, on se recroqueville sur son triple A. On s'y cramponne comme à un vieil Eden. La zone euro n'en mène pas large outre mesure. Les cigales d'Occident s'interrogent sur leur insouciance. Elles sont assaillies par le stress des fourmis.

La paille

La paille est ficelée aux heures d'été. Ligotée au petit matin dans les champs silencieux. C'est un cirque insolite à mille roues immobiles. Temps d'attente d'un étang, d'une mer rouge. Sainteté du coquelicot, cheminant dans la pierre.
Au sud, la couleur retourne à ses pinceaux. Un grand gars s'embrouille dans sa musique. Baragouine le chant des oiseaux. Saute, fait l'aplat sur la terre.

jeudi 11 août 2011

Bouclier vivant

Sarkozy aime la crise. Les socialistes moins. Car quoi promettre ? S'entêter à s'endetter ? Saigner l'électeur de ravageurs impôts ?.
Sarkozy se complaît dans le scénario de l'urgence qui justifie à plein sa fébrilité pathologique. L'urgence ravaude l'agitation en vertu de circonstances. Sarkozy s'offre en bouclier vivant du krach financier. Dans le même temps, les socialistes musardent à la plage. A l'exception de Ségolène Royal, au dévouement exemplaire, qui garde la maison, qui squatte Solférino en l'absence de ses propriétaires bobos.

Récit

La mémoire des morts est une entreprise destinée à l'échec. Avec ses deux doigts serrés, la prière du crayon évacue des images, suit son récit sur la page. Ces mots taillés d'un corps vivant ratent beaucoup de choses.
Ils creusent l'écart entre vie et fantaisie. Ils s'égarent d'un pas volontaire dans un noir imaginaire. Je les griffonne à ma façon dans l'espoir d'y voir clair à l'horizon. Staël pour le style, F comme fusil, famille, father ou Fairbanks. Papa jouit de toutes les lettres de l'alphabet. Visages en déconfiture dont j'ai croisé la fureur.

mercredi 10 août 2011

Mort à crédit

Les marchés chassent en meute, dézinguent la Grèce. L'Europe latine n'en mène pas large outre mesure. Les pions de la notation asticotent l'Amérique, lui confisquent son étoile de shériff. A Londres, on dégrade pour de bon. L'émeute est le mode d'expression des misères urbaines. On détruit de la valeur. Le vandalisme des quartiers mime la déprédation boursière. On ne croit plus qu'au cri.
Le crédit a perverti l'économie. La dette, maladie des pauvres, contamine la santé des riches. On vit aux frais de la princesse. C'est une colonne infinie à la Brancusi. On a décidé de ne pas fêter le cinquantenaire de la mort de Céline. Or "Mort à crédit" est un roman de génie, une vision précise d'aujourd'hui.

dimanche 7 août 2011

Murdoch (2)

A la lecture du dernier volet de l'enquête du Monde consacrée à Rupert Murdoch, j'ai relevé une inexactitude. L'auteur évoque le "formidable catalogue des programmes de ses réseaux câblés".
Or l'expression "réseaux câblés" désigne communément l'infrastructure technique d'un des modes de distribution de la télévision. Elle n'est pas du tout réservée aux contenus. A vrai dire, l'article entretient la confusion entre "chaînes câblées" et "réseaux câblés".
Pour faire bonne mesure, il convient d'ajouter que "network", le terme américain pour "réseau", renvoie aux seules grandes chaînes hertziennes, dont Fox - l'actif emblématique de Murdoch - fait partie.

jeudi 4 août 2011

Murdoch

L'enquête du Monde consacrée à Rupert Murdoch relate les moments forts d'une saga industrielle éblouissante. L'Australo-Américain est un magnat des médias visionnaire. Sa stratégie à l'échelle mondiale dévoile un sens de l'anticipation, une réactivité aux marchés et un opportunisme commercial qui le hissent largement au-dessus des autres "tycoons" de sa génération. S'il est juste de rappeler ses démêlés avec un entrepreneur d'envergure comme John Malone, il est inapproprié d'évoquer son duel avec Jean-Marie Messier, pâle rejeton d'une technocratie à la française. Les deux hommes ne jouaient pas dans la même division.
De surcroît, j'ai été surpris que Murdoch soit dépeint comme "le contraire d'un libéral puisque son mode opératoire consiste à détruire la concurrence en créant un monopole défendu ensuite bec et ongles". Car son implantation américaine, d'une audace folle, ne correspond pas du tout à pareille analyse. Murdoch s'invite à la table des ogres - celle des trois réseaux historiques ABC, CBS et NBC - sans qu'aucun de ces grands médias ne l'ait convié. Il endosse un rôle d'outsider au toupet insensé sur un marché publicitaire éminemment concurrentiel. Le network Fox se construit brique à brique, journée après journée, dans un combat frontal avec les leaders emblématiques du prime time américain. Il s'approprie "Les Simpsons", série politiquement incorrecte, dont aucune télévision ne veut. Il invente la contre-programmation. Non, l'Amérique n'attendait pas Murdoch. Son couvert n'était pas mis à son arrivée. Le nouvel entrant Fox s'est taillé une place à la force du poignet. Jamais de la vie, il ne pouvait revendiquer le monopole de quoi que ce soit.

mercredi 3 août 2011

Premier sorti

"Jumeau premier sorti". Je lis ces mots sur un papier de notaire. Extrait du ventre de ma mère. L'écriture est fignolée dans ses courbes, soignée dans son dessin, précieuse dans ses fantaisies convexes. Je suis né à l'heure du goûter.
Premier sorti. Premier sorti du coup de grisou. Avant les éboulis de la galerie minière. Soeur de destin, morte au premier jour. La deuxième ne s'en sort pas. Pas d'autre survivant. J'ai payé ma vie au prix du crime. Ma petite soeur des pauvres séjourne dans les limbes. J'écris au petit bonheur la chance, sans rien comprendre, premier de cordée. Major des aurores. Major du corps de ma mère.
La jeune notaire rassemble ses papiers. J'ai cessé de lire le banal procès-verbal. Je suis à Lyon, dans un building de province, avec ma soeur dans l'ascenseur.

mardi 2 août 2011

Repli hexagonal

Les ministres sont priés de se reposer intra muros, de paresser au soleil à l'intérieur des seules frontières nationales. A l'Elysée, la France est recommandée pour se refaire une santé. Dans les partis, on se conforme à la même prescription. Les vertus du terroir sont privilégiées, campagne électorale oblige. Aux dernières nouvelles, les vacances du personnel politique se partagent entre la Bretagne et le littoral méditerranéen.
On peut se demander si ce repli estival sur l'hexagone est de nature à préparer les périls du grand large. La France souffre d'un mal endémique: elle peine à sortir de son enclos, de ses schémas doctrinaux, de ses lignes Maginot. Elle voyage mal. C'est pourquoi elle se recroqueville sur elle-même. Stratégie d'escargot.
En août, les ministres se retranchent sur leurs terres au lieu de se colleter à l'étrangeté du monde émergent. Ils excellent à parler de mondialisation sans la moindre connaissance du terrain.

Claridge

J'ai connu l'éternité du vivant de mon père. J'évite le duplicata des marchands. Le mystère d'un regard glissait alors sur l'apparence du monde.
Je vois la peau fripée de ses mains, ses doigts courbes apaisés. Je remonte l'avant-bras en attente de mots inadéquats. L'été s'use dans des ciels sans beauté. La joie éclate au creux des seuls émois.
Je paresse sans hasard sur un banc de Paris. Les lettres du Claridge brouillent mes souvenirs d'enfant. Trop de bleu tue la mémoire des lieux. Je m'évade dans un infini frontal.

lundi 1 août 2011

Boulez

Vieux Boulez au front dégoulinant de rides mélancoliques. Tranchant d'une parole qui coupe à vif, avec une justesse de métal, qui touche à l'os avec une précision presque lasse.
Le maître de musique dirige Mahler. Il lance dans l'espace ses bras, ses mains, ses doigts. Il boxe avec l'invisible. A l'orchestre, il jette ses sortilèges de sorcier chevronné.
L'immatérialité sonore s'apparente à la divine absence. Le désert de l'oeil assujettit les corps, dompte l'esprit comme nul autre empire.