mercredi 2 avril 2025

Les quarterons de la raison

Ils considèrent la raison comme un titre de propriété. Ils appartiennent au cercle du même nom qu’ils tracent au tableau, dos au peuple, dans des cours magistraux. Ils usent d’un phrasé docte, abstrait, distancié. Ils parlent du terrain comme d’un pays lointain. On sait où se trouvent leurs dossiers : sur la table. Ils squattent les bureaux des palais lambrissés, bien au chaud, isolés du chaos par les mots. Jadis ils ont excellé dans l’art de collectionner les trophées d’excellence, de truster les premiers accessits des palmarès d’école. D’une génération à l’autre, ils se succèdent et renaissent comme dans une ronde de travailleurs saisonniers. Les noms importent peu. On les confond. Ils sont fabriqués à la même usine délocalisée. La même que Macron. Ils sont nés légitimes, coiffés au même atelier. Fabius, Juppé. Présidents à vie, sans être élu mais l’ayant fort voulu. Messier, Pigasse. Corsaires de la finance, patrons mégalos qui se sont rêvés présidents jupitériens, à vie. Philippe, Wauquiez, Le Maire, Pécresse. Candidats de droit d’aujourd’hui, ou d’un hier proche. Même mépris pour le pays. Ces neuf-là ne doutent de rien. Ces deux quarterons de la raison, plus Macron, à trop se ressembler, se détestent comme des rivaux mimétiques girardiens. Tous ces perroquets du tourniquet haïssent encore davantage le paltoquet du Touquet. Car lui seul à ce jour, sorti du même cercle, a décroché la timbale. Deux fois. Double inimitié.