lundi 12 novembre 2018

Le requiem des poilus

Temps pourri de 11 novembre. On s’alanguit devant la télévision. Je regarde l’arrivée du Tour de l’itinérance mémorielle, course à étapes de fin de saison. Final majestueux sur les Champs-Elysées. Sprint massif des dignitaires du peloton. Trump et Poutine, les leaders du classement général, n’ont pas pris part à l’emballage terminal. C’est Macron, le régional de l’étape, qui rafle la victoire. Il a soulevé le trophée de l’Armistice devant le public en liesse.
C’était un jour de crachin, un dimanche de chagrin. J’ai observé la cargaison de dignitaires fourrés dans des autocars. J’ai zappé le grand raout de la paix. Car les sermons à répétition pèsent une tonne d’ennuyeuse communication. On pérore plus qu’on ne commémore. Le petit marquis a déambulé au centre de Paris, exhibé ses dents de requin, arboré son sourire de trader patricien. Macron achevait sa tribulation territoriale, son micro-trottoir mémoriel. Il ralluma la flamme du soldat inconnu, premier de cordée, lié aux cache-cols jaunes, illustrant sa brillante théorie du ruissellement.
Sous le coup de cinq heures, la musique de Wolfgang Amadeus Mozart a tué le match, a ressuscité les morts dans la cathédrale de Verdun. On s’est décoiffé devant la beauté comme devant les gueules cassées. La splendeur sonore, hors les mots, était seule à hauteur des héros des tranchées. Arte, la chaîne franco-allemande, a fait le job quand d’autres soignaient leur pub. On s’est tu devant le requiem des poilus.

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