Assunta. Ferragosto. Le choc rouge de Titien, chiesa dei Frari. Vitrail jaune acide qui coiffe l'abside de Saint-Sulpice. Journée de tirée. Jour férié. On marche sur des os. Les premières feuilles mortes craquent comme des chips.
Des cambrioleurs s'introduisent dans les églises, photographient les frises, se signent au nom du père et du fils. Ciel voyou, terre étale. Tournicotent dans ma tête les mêmes histoires de mi-août. Les étés se fêlent comme les vaisselles.
mercredi 15 août 2012
Ferrare en tête
J'ai du mal à m'extraire de l'infinie rêverie d'Italie. Envie de rien. Envie de me rendormir au petit matin. De revivre en songe la joie d'être soi, l'émoi d'être un roi parmi les ciels sensuels de Ravello. M'attabler sans projet dans la paix de Colle di Val d'Elsa. M'étourdir de prosecco devant les eaux de Mattimata.
Mièvrerie de Parigi. Asiatisé par l'été. Vite je veux repartir comme je veux relire Proust. A défaut de cela, une même fadeur de chewing-gum pèse sur des heures sans foi.
J'ai Ferrare en tête. J'ai foncé chez le gros libraire, farfouillé dans les hautes étagères. "Le Roman de Ferrare". Giorgio Bassani est le régional de l'étape romagnole. Je lui confie la tâche impossible d'en restituer la féerie.
Mièvrerie de Parigi. Asiatisé par l'été. Vite je veux repartir comme je veux relire Proust. A défaut de cela, une même fadeur de chewing-gum pèse sur des heures sans foi.
J'ai Ferrare en tête. J'ai foncé chez le gros libraire, farfouillé dans les hautes étagères. "Le Roman de Ferrare". Giorgio Bassani est le régional de l'étape romagnole. Je lui confie la tâche impossible d'en restituer la féerie.
lundi 13 août 2012
Cent secondes
Dans les courses de fond et de demi-fond, l'athlète faisait jadis ses classes en sa qualité de "lièvre". Le "lièvre", c'est le "gregario" en vélo ou le "nègre" en littérature. Il fait le travail, le sale boulot, laisse la gloire au champion.
David Rudisha, sublime vainqueur d'un huit cent mètres d'anthologie, a périmé l'emploi des coureurs sacrificiels. Il a tué le "lièvre" avec son fusil à deux tours de piste. Il a accompli la double boucle, sans voir la meute à ses trousses. Rudisha a déployé sa majestueuse foulée durant cent secondes. Nous étions bouche bée: il y avait une beauté infinie dans ce genre de folie. Le Kényan a pulvérisé le record du monde. Il a réinventé le demi-fond comme Fossbury a révolutionné le saut en hauteur.
"C'est de la poésie pure !" s'est exclamé un commentateur de télévision. Je suis d'accord. Plus que Bolt, Rudisha a imprimé sa marque sur la piste de Londres.
David Rudisha, sublime vainqueur d'un huit cent mètres d'anthologie, a périmé l'emploi des coureurs sacrificiels. Il a tué le "lièvre" avec son fusil à deux tours de piste. Il a accompli la double boucle, sans voir la meute à ses trousses. Rudisha a déployé sa majestueuse foulée durant cent secondes. Nous étions bouche bée: il y avait une beauté infinie dans ce genre de folie. Le Kényan a pulvérisé le record du monde. Il a réinventé le demi-fond comme Fossbury a révolutionné le saut en hauteur.
"C'est de la poésie pure !" s'est exclamé un commentateur de télévision. Je suis d'accord. Plus que Bolt, Rudisha a imprimé sa marque sur la piste de Londres.
jeudi 9 août 2012
Jouer avec le feu
Ils agitent des fanions. Ils se peinturlurent la figure aux couleurs de leurs étendards. La peau est le support du drapeau. Ils sont galvanisés par la fièvre partisane et la ferveur chauvine. Les Jeux autorisent sans modération le fanatisme des nations.
La comptabilité des hochets est destinée à échauffer les guerriers. On se rétracte sur ses réflexes, on cède à ses instincts. L'olympisme génère l'autarcie de terroir. La bien-pensance élitaire tolère ce bestial embrasement planétaire. Elle ferme les yeux sur le nationalisme festif et braillard. Les Jeux sont une parenthèse populiste de temps de crise.
La comptabilité des hochets est destinée à échauffer les guerriers. On se rétracte sur ses réflexes, on cède à ses instincts. L'olympisme génère l'autarcie de terroir. La bien-pensance élitaire tolère ce bestial embrasement planétaire. Elle ferme les yeux sur le nationalisme festif et braillard. Les Jeux sont une parenthèse populiste de temps de crise.
mardi 7 août 2012
L'indécision des sexes
"Masculin/Féminin". On a lu le livre de Françoise Héritier. On a vu et revu le film de Jean-Luc Godard. On a regardé la télé. Les Jeux nous abreuvent de corps des deux sexes. Ils s'expriment dans la gloire d'une jeunesse. En gros plan, au ralenti, sous toutes les coutures, on observe des silhouettes d'un troisième genre. De loin, vue de haut, la femme ressemble à l'homme comme deux gouttes d'eau. Sa puissance musculaire l'apparente au modèle masculin. A Londres, tout se passe comme si l'athlétisme illustrait ladite "théorie du genre".
L'indécision des sexes brouille les cartes du regard. Le flou des usuelles démarcations crève l'écran.
A examiner de près la compétition, on réalise combien l'idéal d'un corps-type par discipline relève de la fantasmagorie biologique. Sur 3000 mètres steeple, un tout petit Kenyan rivalise avec un grand échalas de Français. En sprint, on observe des corps à morphologie contrastée, avec des échelles différenciées dans le sculptural. Dans les postures de course, la crispation d'un visage côtoie la quiète sérénité d'un autre. Certes, les corps des deux sexes se rapprochent. Mais, dans le même temps, prévaut le beau paradoxe de la diversité.
L'indécision des sexes brouille les cartes du regard. Le flou des usuelles démarcations crève l'écran.
A examiner de près la compétition, on réalise combien l'idéal d'un corps-type par discipline relève de la fantasmagorie biologique. Sur 3000 mètres steeple, un tout petit Kenyan rivalise avec un grand échalas de Français. En sprint, on observe des corps à morphologie contrastée, avec des échelles différenciées dans le sculptural. Dans les postures de course, la crispation d'un visage côtoie la quiète sérénité d'un autre. Certes, les corps des deux sexes se rapprochent. Mais, dans le même temps, prévaut le beau paradoxe de la diversité.
jeudi 5 juillet 2012
Higgs et Joyce
On avait le mot. Boson. Mais pas la chose. Le grand collisionneur vient de la débusquer de sa cachette. Boson existe, on l'a collisionné. Le nom de boson vient de Higgs, un Ecossais. Higgs est un nom dont la sonorité évoque l'inconnue mathématique, le petit x d'une impossible équation.
Dans l'infiniment petit, les noms ont besoin de fantaisie. Ils sont suggérés par nos amis du Royaume-Uni. Dans Finnegan's Wake, Joyce invente le mot quark. Le poète irlandais précède le savant écossais dans le nommage des grandes énigmes de la nature.
Dans l'infiniment petit, les noms ont besoin de fantaisie. Ils sont suggérés par nos amis du Royaume-Uni. Dans Finnegan's Wake, Joyce invente le mot quark. Le poète irlandais précède le savant écossais dans le nommage des grandes énigmes de la nature.
mardi 3 juillet 2012
Un salariat sale
Le capitalisme pratique le culte de la marchandise. C'est une religion de la convoitise. Elle ne parle d'autre langue que l'idiome du marché, ne célèbre d'autre idole que l'argent. Pareil mode de production érige la prostitution au centre de son organisation. Le sourire de prostituée transite par la publicité.
Dans l'anonymat d'un monde d'appâts, le salariat légitime l'achat du corps. La force de travail est sollicitée à l'envi comme la prostituée des trottoirs.
Le travailleur manuel vend sa sueur, ses muscles et son coeur à l'ouvrage. Le travailleur intellectuel cède au plus offrant l'agilité de ses neurones.
Dans ce cadre général d'un capitalisme brutal, la prostitution n'illustre qu'un cas particulier d'exploitation. La location libre des sexes n'est pas de nature différente de l'octroi par contrat des bras et cerveaux.
Dès lors, on peut s'interroger sur l'angélisme d'une proposition politique visant à prohiber le commerce de la prostitution. En arrière-plan, on semble identifier les contours d'un tabou, l'interdit moral d'un salariat sale qu'il conviendrait d'éradiquer. La chasse à la grisette flaubertienne témoigne d'une flambée d'idéologie victorienne.
Dans l'anonymat d'un monde d'appâts, le salariat légitime l'achat du corps. La force de travail est sollicitée à l'envi comme la prostituée des trottoirs.
Le travailleur manuel vend sa sueur, ses muscles et son coeur à l'ouvrage. Le travailleur intellectuel cède au plus offrant l'agilité de ses neurones.
Dans ce cadre général d'un capitalisme brutal, la prostitution n'illustre qu'un cas particulier d'exploitation. La location libre des sexes n'est pas de nature différente de l'octroi par contrat des bras et cerveaux.
Dès lors, on peut s'interroger sur l'angélisme d'une proposition politique visant à prohiber le commerce de la prostitution. En arrière-plan, on semble identifier les contours d'un tabou, l'interdit moral d'un salariat sale qu'il conviendrait d'éradiquer. La chasse à la grisette flaubertienne témoigne d'une flambée d'idéologie victorienne.
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