Panade, mouise, pétrin. Merde. Les mots affluent pour désigner la crise. Nous sommes plongés dedans. A notre corps défendant. Nos déboires ont une histoire. Nous traînons des dettes depuis belle lurette. Nous n'avons plus le sou depuis Pompidou. Nous vivons sans broncher au crochet des marchés. Qu'est-ce que la dette ? Un budget insatisfait qui se plaît au déséquilibre. Pourquoi donc, sacré bonsoir ? Parce que la dépense est souveraine en régime d'opinion.
La démocratie est fille de panier percé. Car elle exige de ses chefs qu'ils séduisent le peuple, qu'ils répondent à ses voeux, qu'ils promettent monts et merveilles. Contrairement à la croyance commune, les promesses d'élus sont tenues. Pour une raison simple: le deuxième mandat.
La campagne électorale plante le décor. On serre des mains. C'est le temps inaugural de la démagogie. Suit l'exercice du pouvoir, les tiraillements stratégiques du premier mandat. Gérer ou dépenser ? Se colleter à la réalité épicière ou s'échapper dans l'imaginaire. A mesure qu'un deuxième mandat précise sa possibilité, l'accomplissement des ruineuses promesses redevient d'actualité. On contentera l'électorat dans l'espoir de garder sa couronne de roi.
Autrement dit, la gestion dispendieuse est subordonnée à l'exercice d'un deuxième mandat. La perspective de réélection est fauteuse de gabegie. La dette résulte de l'entêtement du pouvoir, du désir de durer au sommet, de la volonté de se maintenir dans les ors des palais.
Nous sommes endettés jusqu'au cou. Depuis Pompidou, je l'ai dit. Auvergnat hostile aux assignats. La dépendance à la dépense n'est pas créatrice de croissance. Mais d'une certaine aisance hallucinatoire. Elle accoutume au mensonge. Le peuple s'illusionne. Il s'étourdit de ses crédits. Dépenser nuit grave. Dépenser tue. La théorie économique nous enfume depuis des décennies. On s'entête à la dette. Eradiquer le mal suppose de supprimer le détestable deuxième mandat.
lundi 8 octobre 2012
dimanche 7 octobre 2012
Lot de trois
Brun, blond, chauve: Modiano, Echenoz, Quignard. Tiercé des libraires. Trio du loto littéraire. Gagnants dans un fauteuil au palmarès des bonnes feuilles.
La télévision élit roi ce lot de trois. Ils se coudoient devant l'arbitre des élégances poétiques. L'animateur de France Cinq instruit des enjeux de la quinzaine commerciale: les trois lascars sont les meilleurs conteurs du royaume.
Ni Modiano, ni Echenoz, ni Quignard ne se lèvent d'un bond à pareille évocation. Ils apprécient le satisfecit. Ils sourient de manière un peu niaise comme les invités des plateaux qu'on se repasse un peu trop. Ils acceptent le sceptre d'une postérité préemptée.
Modiano fait son numéro coutumier de bègue inspiré. Echenoz le mime à la perfection, mais sans les mains dans le vide à chasser les mots et démons qui désordonnent et inachèvent. Il tient son guidon et la parole crispée du bon ton. Quignard fait cavalier seul. Quignard est bavard selon les normes du parleur. Ses yeux bleus trouent la quiétude des songe-creux. Il ne se souvient plus très bien. On est loin du sens commun.
L'émission du jeudi est destinée à vendre du papier, de la notoriété, du temps retrouvé. Ni une, ni deux: j'achète "Quatorze". Echenoz a bredouillé des mots délicats sur l'ivrognerie des soldats. Je m'exalte sur la gueule de bois des gueules cassées. Les trois lauréats des magazines se dévisagent du coin de la paupière. On sent une commune tendresse pour la bouteille.
La télévision élit roi ce lot de trois. Ils se coudoient devant l'arbitre des élégances poétiques. L'animateur de France Cinq instruit des enjeux de la quinzaine commerciale: les trois lascars sont les meilleurs conteurs du royaume.
Ni Modiano, ni Echenoz, ni Quignard ne se lèvent d'un bond à pareille évocation. Ils apprécient le satisfecit. Ils sourient de manière un peu niaise comme les invités des plateaux qu'on se repasse un peu trop. Ils acceptent le sceptre d'une postérité préemptée.
Modiano fait son numéro coutumier de bègue inspiré. Echenoz le mime à la perfection, mais sans les mains dans le vide à chasser les mots et démons qui désordonnent et inachèvent. Il tient son guidon et la parole crispée du bon ton. Quignard fait cavalier seul. Quignard est bavard selon les normes du parleur. Ses yeux bleus trouent la quiétude des songe-creux. Il ne se souvient plus très bien. On est loin du sens commun.
L'émission du jeudi est destinée à vendre du papier, de la notoriété, du temps retrouvé. Ni une, ni deux: j'achète "Quatorze". Echenoz a bredouillé des mots délicats sur l'ivrognerie des soldats. Je m'exalte sur la gueule de bois des gueules cassées. Les trois lauréats des magazines se dévisagent du coin de la paupière. On sent une commune tendresse pour la bouteille.
vendredi 5 octobre 2012
Les épaulettes
Sarkozy, c'étaient les talonnettes. Valls, ce sont les épaulettes. Hollande fend la foule avec une lenteur d'évêque. On a l'impression qu'il discerne mal l'horizon, qu'il marche à tâtons dans son champ de vision.
Montebourg distribue les coups de menton. Peillon est satisfait de sa personne. C'est un maître d'école qui se pousse du col. Moscovici est un habile teneur de caisse. Fabius garde ses distances, soigne sa hauteur patricienne. Cahuzac teste ses médications, s'exerce, ou plutôt exerce au budget.
Chateaubriand, pair de France, était une langue de vipère. Il fustigeait "les ministres qui tombaient de la médiocrité dans l'importance".
Montebourg distribue les coups de menton. Peillon est satisfait de sa personne. C'est un maître d'école qui se pousse du col. Moscovici est un habile teneur de caisse. Fabius garde ses distances, soigne sa hauteur patricienne. Cahuzac teste ses médications, s'exerce, ou plutôt exerce au budget.
Chateaubriand, pair de France, était une langue de vipère. Il fustigeait "les ministres qui tombaient de la médiocrité dans l'importance".
L'armoire à fusils
Un fusil est un ami qui dort sur votre joue. Il sent le bois, l'huile et l'acier, parfois la poudre. L'armoire à fusils est une sorte d'écurie où chaque arme repose dans sa stalle.
C'est un butin planqué, au bout d'un long destin, qui - privé d'un maître - se laisse dépouiller. Le "superposé", aussi précieux que disgracieux, enchanta mes rêveries de ses coups de longueur. Je ne le vois pas sur l'étagère. Je vois la perdrix morte de l'allée des tilleuls.
Reste l'adorable "vingt-huit", léger comme une plume, délicatement orné de ses chiens sculptés. Il tua le faisan de mes treize ans, ajusté sans broncher dans le jardin potager. Il y a le "seize" que je n'aime que parce que c'est le mien. J'observe les deux "vingt" de papa. Le platiné et l'autre écaillé. J'appréciais le petit "vingt" à la passée des grives. Pas de "douze" car papa trouvait non avenu ce fusil de battue. Trop lourd à son gré. L'art de papa s'apparentait à la phrase de Céline.
Le gibier s'étalait par rangées sur le gravier. Je me souvenais du partage des tableaux de chasse. Or c'est déjà l'heure de la distribution des armes.
C'est un butin planqué, au bout d'un long destin, qui - privé d'un maître - se laisse dépouiller. Le "superposé", aussi précieux que disgracieux, enchanta mes rêveries de ses coups de longueur. Je ne le vois pas sur l'étagère. Je vois la perdrix morte de l'allée des tilleuls.
Reste l'adorable "vingt-huit", léger comme une plume, délicatement orné de ses chiens sculptés. Il tua le faisan de mes treize ans, ajusté sans broncher dans le jardin potager. Il y a le "seize" que je n'aime que parce que c'est le mien. J'observe les deux "vingt" de papa. Le platiné et l'autre écaillé. J'appréciais le petit "vingt" à la passée des grives. Pas de "douze" car papa trouvait non avenu ce fusil de battue. Trop lourd à son gré. L'art de papa s'apparentait à la phrase de Céline.
Le gibier s'étalait par rangées sur le gravier. Je me souvenais du partage des tableaux de chasse. Or c'est déjà l'heure de la distribution des armes.
mardi 2 octobre 2012
Ecole du Louvre
C'est un théâtre dans la nuit, un amphithéâtre qui rompt avec la fureur de la rue de Rivoli. Les travées sont bondées de jeunes filles pressées, de vieilles femmes studieuses, de vieux hommes figés.
Le parleur est retranché dans l'ombre, barricadé à l'extrêmité gauche de l'estrade. Il s'est volontairement décentré comme on s'efface au passage d'une altesse, d'une image, d'une sainte figure de pédagogie.
Il parle bas, articule long, détache les syllabes de sa phrase. Il tâche de se défaire d'un mauvais roi, de contrarier le bégaiement de sa voix.
Il fouaille, dissèque les entrailles de l'abbaye romane. Il use d'une parole descriptive qui fuit le concept, introduit au transept. On scarifie nos cahiers à la lueur de pupitres écaillés. Les séants se tordent d'inconfort.
L'érudit a fini son récit. Une pluie d'applaudissements ponctue la causerie avant l'échappée mécanique vers la rue.
Le parleur est retranché dans l'ombre, barricadé à l'extrêmité gauche de l'estrade. Il s'est volontairement décentré comme on s'efface au passage d'une altesse, d'une image, d'une sainte figure de pédagogie.
Il parle bas, articule long, détache les syllabes de sa phrase. Il tâche de se défaire d'un mauvais roi, de contrarier le bégaiement de sa voix.
Il fouaille, dissèque les entrailles de l'abbaye romane. Il use d'une parole descriptive qui fuit le concept, introduit au transept. On scarifie nos cahiers à la lueur de pupitres écaillés. Les séants se tordent d'inconfort.
L'érudit a fini son récit. Une pluie d'applaudissements ponctue la causerie avant l'échappée mécanique vers la rue.
lundi 1 octobre 2012
Il a quel âge, Bayrou ?
"Il n'y a que les faibles qui craignent la compétition". Bayrou hausse le niveau de son université. Il recycle la vieille fable capitaliste du renard libre dans un poulailler libre. Bayrou s'excentre dans le registre d'une morale à deux balles.
Le grand sachem du Modem s'exerce à la maxime assassine. Or l'homme qui cause ainsi distord la vérité des choses. Il amalgame le faible et le doux. Car ce sont les doux, eux-seuls, qui esquivent la compétition, la fuient comme la peste, par éthique de conviction.
Ils savent que la concurrence n'attise que la violence, que la rivalité ne produit que l'inimitié. Autrement dit, Bayrou le matamore se pose en petit caïd de cour de récréation. Il agite ses petits bras, montre à Borloo ses biscotos. Il a quel âge, Bayrou ?.
Le grand sachem du Modem s'exerce à la maxime assassine. Or l'homme qui cause ainsi distord la vérité des choses. Il amalgame le faible et le doux. Car ce sont les doux, eux-seuls, qui esquivent la compétition, la fuient comme la peste, par éthique de conviction.
Ils savent que la concurrence n'attise que la violence, que la rivalité ne produit que l'inimitié. Autrement dit, Bayrou le matamore se pose en petit caïd de cour de récréation. Il agite ses petits bras, montre à Borloo ses biscotos. Il a quel âge, Bayrou ?.
Le pain
J'achète mon pain à la première heure. La boulangerie sourit seule dans la nuit. Verticales comme des fusils en émoi, les baguettes se mêlent, pareilles dans leurs corbeilles aux flèches des carquois.
La ronde marchande me tend une moitié enrubannée de papier. J'en sens le chaud dans ma paume. Je me débarrasse de petites pièces malades, jaunies d'économie.
J'ai peur que l'aurore ne refroidisse un fugitif délice. Je hâte le pas. L'ascenseur me hisse à l'étage. Je sors de la cage. Je me jette sur le pain, les narines tachetées de farine.
La ronde marchande me tend une moitié enrubannée de papier. J'en sens le chaud dans ma paume. Je me débarrasse de petites pièces malades, jaunies d'économie.
J'ai peur que l'aurore ne refroidisse un fugitif délice. Je hâte le pas. L'ascenseur me hisse à l'étage. Je sors de la cage. Je me jette sur le pain, les narines tachetées de farine.
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