dimanche 7 octobre 2012

Lot de trois

Brun, blond, chauve: Modiano, Echenoz, Quignard. Tiercé des libraires. Trio du loto littéraire. Gagnants dans un fauteuil au palmarès des bonnes feuilles.
La télévision élit roi ce lot de trois. Ils se coudoient devant l'arbitre des élégances poétiques. L'animateur de France Cinq instruit des enjeux de la quinzaine commerciale: les trois lascars sont les meilleurs conteurs du royaume.
Ni Modiano, ni Echenoz, ni Quignard ne se lèvent d'un bond à pareille évocation. Ils apprécient le satisfecit. Ils sourient de manière un peu niaise comme les invités des plateaux qu'on se repasse un peu trop. Ils acceptent le sceptre d'une postérité préemptée.
Modiano fait son numéro coutumier de bègue inspiré. Echenoz le mime à la perfection, mais sans les mains dans le vide à chasser les mots et démons qui désordonnent et inachèvent. Il tient son guidon et la parole crispée du bon ton. Quignard fait cavalier seul. Quignard est bavard selon les normes du parleur. Ses yeux bleus trouent la quiétude des songe-creux. Il ne se souvient plus très bien. On est loin du sens commun.
L'émission du jeudi est destinée à vendre du papier, de la notoriété, du temps retrouvé. Ni une, ni deux: j'achète "Quatorze". Echenoz a bredouillé des mots délicats sur l'ivrognerie des soldats. Je m'exalte sur la gueule de bois des gueules cassées. Les trois lauréats des magazines se dévisagent du coin de la paupière. On sent une commune tendresse pour la bouteille.

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