vendredi 5 octobre 2012

L'armoire à fusils

Un fusil est un ami qui dort sur votre joue. Il sent le bois, l'huile et l'acier, parfois la poudre. L'armoire à fusils est une sorte d'écurie où chaque arme repose dans sa stalle.
C'est un butin planqué, au bout d'un long destin, qui - privé d'un maître - se laisse dépouiller. Le "superposé", aussi précieux que disgracieux, enchanta mes rêveries de ses coups de longueur. Je ne le vois pas sur l'étagère. Je vois la perdrix morte de l'allée des tilleuls.
Reste l'adorable "vingt-huit", léger comme une plume, délicatement orné de ses chiens sculptés. Il tua le faisan de mes treize ans, ajusté sans broncher dans le jardin potager. Il y a le "seize" que je n'aime que parce que c'est le mien. J'observe les deux "vingt" de papa. Le platiné et l'autre écaillé. J'appréciais le petit "vingt" à la passée des grives. Pas de "douze" car papa trouvait non avenu ce fusil de battue. Trop lourd à son gré. L'art de papa s'apparentait à la phrase de Céline.
Le gibier s'étalait par rangées sur le gravier. Je me souvenais du partage des tableaux de chasse. Or c'est déjà l'heure de la distribution des armes.

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