mardi 28 août 2012

Avoir une vision

Le quinquennat démarre à bout de souffle. Il se traîne. La caravane du changement s'ébranle sans élan. Reviennent aux oreilles les vieux sarcasmes. On dirait des ronds dans l'eau. On songe au pédalo.
Ayrault a conservé sa pâleur d'avant l'été. Il chevrote à la télévision. Sa main tremble comme une feuille. Une feuille de route un peu frêle.
Hollande consulte. Il parcourt des kilomètres d'amabilités, accueille et raccompagne ses visiteurs. Montebourg mime le Chevènement d'antan. Valls jette des yeux noirs. Valls gronde les pauvres. Pas de Valls-hésitation.
Aubry, la mère supérieure d'un socialisme incantatoire, ne lâche pas le magot de la rue de Solferino comme cela. Marie-Ségolène se verrait bien en vert, cheftaine du parti des éoliennes. Bref, rien d'emballant dans le déballage d'egos et la croisière du pédalo.
Le bateau d'Ayrault est encalminé, faute d'activités. Mer d'huile. Les tsunamis sont de l'autre côté de l'horizon.
L'opposition ne se tourne pas les pouces: elle se chamaille. Elle se délecte des querelles de famille. Copé copie Sarko. Il revendique un héritage: l'atavisme de l'activisme. Fillon devise dans les champs, en bordure d'hospice. Il pratique la politique sur une jambe, peut-être même par dessus la jambe. Fillon temporise. Il adopte le même train de sénateur que le président Hollande. La droite, qui a tant raté, n'échappera pas à l'étripage de ses grands sachems. A défaut de faire la planche, Sarko s'emploiera à attiser les braises, s'il le faut.
L'épisode de la viande halal avait scandé l'insipide campagne présidentielle. Le tour de chauffe du quinquennat Hollande s'enlise dans le prix de l'essence à la pompe. A vrai dire, on sent qu'Ayrault n'est pas cap et qu'Hollande n'a pas de cap. Car le cap, c'est bien le problème du capitaine.
On se gargarise souvent d'un mot creux pour définir l'authentique chef d'Etat: la vision. Or nos hommes politiques ont des visières, rarement des visions. A aucun d'eux, de Gaulle n'a transmis son secret du grand dessein. La question de la vision appartient à la mystique du chef. C'est un signe extérieur de sagesse du leader providentiel. Mais c'est aussi un attribut chiche du pouvoir: n'avoir qu'une vision, une seule, quand l'ermite halluciné en perçoit à foison.
Le capitaine de pédalo n'endosse pas nécessairement les mots de son ophtalmo. Il se refuse à chausser des lunettes de sept lieues. Libre à lui. Car le grand homme prévaut par sa vision, un peu comme Jeanne d'Arc s'impose par les voix qu'elle entend. Déjà lassés par l'ennui, nous voulons un chef qui, à défaut d'être visionnaire, entende des voix. Celles des intérêts de la France, par exemple.

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