dimanche 13 décembre 2015

La foire au climat


A cent quatre vingt quinze, on s’entend comme larrons en foire. Par contre, on se neutralise à vingt-huit. A sept fois moins, on se tord la main.
La construction européenne n’est pas assez généreuse dans son recrutement. Elle est étriquée dans sa conception d’un tour de table. L’Europe est une petite Cop qui s’emmêle dans ses querelles de peuples. Si d’aventure elle multipliait les nations qui la composent, on s’accorderait plus à l’aise sur quantité de choses.
L’euphorie du grand gala du Bourget ne vaut pas que pour les contrariétés du climat. Les beaux sourires carnassiers faisaient plaisir à voir. On filma l’émotion de Fabius pour un degré Celsius. Plus on est de fous, plus on s’étourdit les joues. Il faut que l’Europe s’élargisse dans une même allégresse.

samedi 12 décembre 2015

L'aveugle


Je dîne face à l’aveugle. Il ôte ses lunettes, dévoile ses yeux. Il baisse sa garde, pose un regard comme s’il jouait cartes sur table. L’homme est disert, faute de lumière. Je suis sourd à son discours.
Sa main choque un vin, cherche l’entame d’un pain. Il narre une vie, parle avec brusquerie; rare est sa fantaisie.
Il est tiré à quatre épingles, n’a pas bougé d’un iota; à peine une boursouflure sur la figure. La serveuse s’enquiert des désirs de gourmandise.
Avant qu’il ne se taise, la brune oranaise évoque ses déboires de coiffeuse. La confidence déblaie le chemin d’une connivence. Jean l’exhorte à lire La Peste.

jeudi 10 décembre 2015

Nos héros


Un samedi d’hiver, j’ouvrais les grandes grilles d’un ministère, sur les lieux mêmes de l’ancienne école polytechnique, au pâle Bartolone, serré dans sa pèlerine. J’accueillais un conférencier de rechange. Il était petitement arrogant comme il sied à un manant saisi d’embourgeoisement. Il s’exprima avec une pontifiante médiocrité. Le député n’épata pas. Barto n’imprima pas dans la mémoire de nos labos. Une erreur s’était glissée quelque part. Il grimpa jusqu’au perchoir. Quatrième d’une république qui me peine.
Je me souviens d’une petite boulotte, mandatée par l’Elysée, sur une péniche des bords de Seine où Amazon fêtait en fanfare l’ouverture de sa succursale parisienne. Son père peu expert, voire sommaire, m’avait enseigné des rudiments d’approximative économie. 
Pécresse n’évoque pas les grands espaces, Barto n’a rien de nos héros nationaux. Je me demande bien pourquoi les hasards de la vie m’entraînent au plébiscite d’une reine et d’un roi pareils. 

lundi 7 décembre 2015

Sang impur


La Marseillaise a pris comme une mayonnaise.  On la chante dans les mosquées, les minarets et les dancings sonorisés. Le ministre premier a une mine de crevé. Les grandes mâchoires entonnent leur chanson de guerre, l’hymne au sang impur des belles étrangères. Le ministre premier a une figure de déterré.
Il est disc-jockey, chef de chorale, agitateur de drapeau national. Il est blanc comme un linge, leader de bleusaille, moins rouge que les rougeauds patriotes qui votent faux. Il tremble dans un petit corps tricolore à la grand’messe du vingt heures. Le ministre premier donne une consigne d’orientation comme un évêque sa bénédiction. 

dimanche 6 décembre 2015

La bête pantelante


La nation est charcutée en grasses régions bouffies. On dirait le jeune continent d’Afrique tranché au couteau, délimité à la règle. La bête pantelante est faite de treize quartiers numérotés. La région tricolore est une songerie de colon géomètre, une fantaisie de boucher dépeceur.
La démocratie se dégourdit les chevilles à l’intérieur d’un arbitraire bornage. L’électeur jogge, vote dans son parc. On interroge les urnes d’un peuple en treize morceaux. La géographie de cadastre est un latin de cuisine. Il n’est parlé que par ses curés mal lettrés. Chaque chef d’un bout de puzzle sourit à sa parcelle de peuple.
Vite on vote. On dépose un bulletin mais pas les armes de poing. L’adjudant catalan ceinture son imper à épaulettes. Il braille national, exhorte à la guerre totale. Le président du Bourget, gai comme un pinson, pilote un porte-avions. Il jubile au large de la Libye. Les batailles sans merci sont les plus beaux jours de sa vie. 

jeudi 3 décembre 2015

Et bagdadi et bagdada


J’embrouille ma tête avec des épithètes. Je note mes rêves patriotes. La politique de mon pays est un merdique gribouillis. Nos soldats débarquent à Obama Beach. Et bagdadi et bagdada. Les premiers communiants nous mènent au néant.
De Gaulle, c’était bien. L’histoire n’était pas une marque blanche, dénuée de sujet, verbe, complément. On ne se requinque pas avec des corps quelconques.
Dominique de Roux s’adresse au grand sachem : « Général de Gaulle, avec votre gueule d’éléphant du quaternaire, vous étiez l’homme providentiel, parce que vous n’étiez rien si ce n’est, jusqu’à quarante ans, votre propre disciple » (La France de Jean Yanne, Calmann-Lévy, 1974).
De Gaulle était un baobab millénaire. Hollande est un arbre à guirlandes. L’homme sans style dissuade les stèles. Il traîne ses bajoues de dignitaire, s’émeut de Barbara, reine d’un jour des barbares.

mardi 1 décembre 2015

Le militaire Noël


Après novembre, ses saints de jour férié, ses cimetières fleuris, son soldat inconnu, ses victimes identifiées, ses tueries nazies et son Medrano écolo, voici décembre et ses vitrines, ses cadeaux obligatoires et son sapin dérisoire, ses guirlandes et son double gueuleton à l’horizon.
Les enfants délurés touchent les fusils baissés des militaires postés. Cette année, le Père Noël s’est déguisé comme ils aiment. Le soldat d’état d’urgence l’a frappé d’obsolescence. On oublie la tunique rouge coquelicot. La panoplie kaki est dernier cri.
Des rares balcons, où le drapeau d’injonction s’éternise, pendouillent désormais de petits alpinistes de maison. Ils ornent les fenêtres patriotes de gnomes à capuchons, distributeurs de songes creux. Le chef des armées souhaiterait qu’ils soient bariolés des mêmes trois couleurs du mois dernier.
Bref, le militaire Noël a relevé de ses fonctions le vieux pépère tombé du ciel, encore rouge d’un sang qui coule. Pour de vrai. Sinon, les enfants feront des rondes, un peu comme des manifestations.