mercredi 27 janvier 2021

Allez vous faire foutre

Je me réveille. La télé ressasse un journal, rabâche ses nouvelles. Je me réveille. Je saisis le message au vol, mémorise une adresse, pianote les touches du bidule, clique, clique et reclique, confesse un âge, révèle la situation géographique de mon gîte, dévoile un motif de consultation. S’affiche une lumière, une sorte de ciel bleu : « première injection vaccin ». J’exulte. Je bégaie de l’index, clique encore et encore. Un communiqué s’imprime, s’achève à l’impératif. « En raison d’une forte demande, ce centre n’a plus de disponibilités : 1 134 vaccinations vont avoir lieu dans les 28 prochains jours. Réessayez dans quelques jours ou cherchez un autre centre ». Bref, allez vous faire foutre ! On se bat sans cartouches, c’est écrit sans hypocrisie, sans menterie : « plus de disponibilités ». La guerre déclarée au virus, Mauricette en tête, faute d’un chef valide, se poursuit dans une misère noire, s’éternise dans la disette, la mendicité, le renoncement, l’humiliation. Je suis fait prisonnier, ligoté, emmuré. Je raconte une guerre, ma première guerre. Je témoigne de la stratégie Mauricette de l’état-major. Je ne sais pas comment m’évader. Je voudrais sortir de là. Gagner le large, atteindre le petit vaccinodrome du coin, sonner à la porte du 3 rue de Lisbonne. Ma liberté a un nom : Allez vous faire foutre.

Aucun commentaire: