lundi 26 avril 2021

Infaillibilité papale

L’infaillibilité du magistrat est un dogme d’Etat. La décision de justice ne souffre aucune question critique, ne tolère pas l’opinion contradictoire, n’admet ni la réserve ni le doute. Faute de quoi, l’institution serait délégitimée, fragilisée au point de sombrer. J’entends ce catastrophisme obligatoire, ce discours de peur qui fige la pensée, qui glace la réflexion. Il me déplaît comme toute vérité non démontrée. Nos points de stabilité républicains exigent un ancrage d’airain. Pour ce faire, la raison satisfait mieux aux conditions de solidité de la fondation que la religion d’une corporation. La liberté de parole ne peut être entravée par un bâillon prudentiel, sorte de masque de prévention dissuasif du mal, distribué par une profession d’élite, si digne soit-elle. Attribuer une sorte d’infaillibilité papale à tout oracle de tribunal constitue une régression archaïque de la raison, révèle un privilège vieilli d’institution. Rien ne peut m’interdire de penser, dans mon for intérieur ou à la cantonade, que Madame Sara Halimi a été assassinée de sang froid par un homme comme moi, qui répond de l’ignominie de son acte, qui sait en conscience qu’il viole une loi. Les juges se déjugent à se cacher derrière un peuple dont ils seraient l’expression souveraine. Dans un prétoire, le peuple fait bande à part. Le peuple n’est qu’un symbole antique, sans vertu d’assemblée, sans la force d’une présence réelle de type eucharistique. Le peuple d’un prétoire, ce n‘est pas moi, ni toi. C’est personne, un principe ou une statistique. Une idée, peut-être. Une idole hors sol.

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