jeudi 17 février 2011

Nora

"Mort à crédit" est un ouvrage hurlé à la première personne, jeté par dessus bord, balancé dans l'avenir d'un beau geste pervers. On sent l'haleine, le souffle de Ferdinand sur la joue du papier. Nora m'ensorcelle. Nora est la fée de chair de Rochester. Nora règne sur une centaine de pages comme la plus éperdue des beautés égarées. Céline conte l'histoire par coups de boutoir, alterne l'attente et l'attentat. Il écrit sous la dictée du noir romantisme.
Nora non plus n'était "pas rebutable". Pas remédiable pour un sou. Les femmes de Céline sont d'un seul tenant, fée, guerrière ou sorcière. Elles font trembler les petites lignes qu'il dessine. Nora rompt la cérémonie du mutisme, brise la monotonie de pluie, de vert, de gris hiver d'Angleterre. Nora dégringole vers une mer de givre. Nora se sauve. Jette son corps à la nuit, franchit la ligne d'horizon, va pour de bon derrière ses démons. Céline, qui connaît le pays, n'en revient pas. Céline s'admire écrire, s'émeut à ses souvenirs, se noie violemment, à pleine voix, dans "un sortilège de douceur".

Aucun commentaire: