Le
pire, ce sont les fausses joies. Pourquoi Sollers m’a-t-il téléphoné le
lendemain de mon dépôt de manuscrit (De Gaulle), me demande de lui apporter
tous mes textes, me donne rendez-vous au café à l’angle, fait une mauvaise
imitation du grand Charles, moi je l’imite beaucoup mieux, m’envoie les
épreuves à corriger, je lui renvoie et puis plus rien. C’était à l’été 1987. Mon
De Gaulle ne trouvera un petit éditeur minuscule qu’en 2002, quinze ans après.
Le
pire, c’est cette Chloé Deschamps chez Grasset qui prend la peine de me
téléphoner pour me dire plein de gentillesses sur ma manière d’écrire avant de
m’exhorter à raconter une histoire. Elle a pourtant d’autres choses à faire
qu’à téléphoner à des inconnus qui ne racontent pas d’histoires.
Certains
écrivains s’auto-éditent. Proust s’est publié à compte d’auteur. Aujourd’hui un
type comme Nabe s’auto-édite. Ou alors on trouve des éditeurs de troisième
zone, ma maison suisse par exemple, qui éditent convenablement mais qui se
fichent complètement de la distribution.
Quoi
faire ? Pour me consoler, je pense à Lagarce - pour qui j’ai beaucoup de
tendresse, son courage, la beauté de sa langue - qui n’a jamais vu ses textes
publiés de son vivant. Pour me consoler, je me dis que l’essentiel c’est
d’avoir envie, envie d’écrire, envie d’aimer. Envie de contempler la langue
française comme on regarde la mer. Et puis il y a des rencontres miraculeuses,
tes livres par exemple qui s’impriment en moi, ce brave gendarme de Nice, au
corps musculeux tatoué jusqu’aux yeux (j’ai vu ses photos sur FB) qui clame sa passion pour mes livres. Il y a
Guy Dupré qui, autour d’un verre de Porto, m’enjoint d’écrire.
Tout cela pour te dire qu’il ne faut pas pleurer mais continuer à se tenir droit, à vouloir la vérité, à persévérer dans la probité des affects, la sincérité des émotions, et les restituer du mieux qu’on peut sous forme de mots dans leur pureté originelle.
Tout cela pour te dire qu’il ne faut pas pleurer mais continuer à se tenir droit, à vouloir la vérité, à persévérer dans la probité des affects, la sincérité des émotions, et les restituer du mieux qu’on peut sous forme de mots dans leur pureté originelle.
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