mercredi 19 janvier 2011

La pichenette du destin

L'insurrection de Tunisie a pris de court les experts en colère populaire. Le sacrifice d'un homme a suffi à ébranler le régime d'un autre âge du dictateur de Carthage. Pareils événements s'apparentent au "périlleux enchaînement des choses", titre du dernier film d'Antonioni. Au-delà du questionnement de l'art, il exprime un devenir en chantier, témoigne de la création historique.
Car la loi des accidents gouverne le destin des hommes. Le récit des peuples n'obéit qu'à la règle des circonstances. A peu de choses près, l'embrasement tunisien démarre comme s'amorce "L'homme sans qualité" de Musil. A partir d'une anecdote, d'un fait divers: la mort volontaire d'un homme.
S'ensuit un déroulé des effets qui paraissent hors de cause. La logique du déterminisme est déjouée. L'anodin devient énorme, déborde la norme. Une chiquenaude précipite les commencements, ensemence leur champ de rayonnement. Le petit détail de l'histoire fait dérailler l'avenir tracé. Il pulvérise les chapitres pré-écrits. L'invention d'une démocratie est peut-être au bout d'une pichenette du destin. Loin des fusils.

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