mardi 3 mars 2015

La voix d'un texte

L'amphithéâtre a fait peau neuve. Les murs ont blanchi, relégué dans une nuit d'amnésie la cinémathèque des origines. La rue d'Ulm exhume les photographies de Jaurès, se réapproprie la mémoire du lieu-dit.
Sur l'estrade, un fervent professeur jongle avec ses volumes de La Pléiade, égare ses notes d'agrégé, retrouve ses papiers comme ses clés.
Il fait tandem avec Denis Podalydès qui classe ses feuillets, l'observe amusé, se concentre sur son thème. Chateaubriand hérite de l'exact patronyme. La voix d'un texte sollicite un émoi, impose un respect, apprivoise une attention.
La salle est comble, comblée du timbre des Mémoires d'outre-tombe. L'hirsute amateur de guillemets  s'enivre de voyelles, scande la phrase du roi René, libère ses doigts dans l'espace, mime la cadence de soleil que l'acteur révèle à l'oreille.
La menotte du chef est une baguette de fée. Le comédien se dresse soudain, exige d'être debout comme s'il réclamait à boire, comme s'il dégrafait la croisée pour mieux admirer la vallée. Podalydès a besoin de tout son corps pour lire en majesté, de hausser le regard pour dire la sobriété sonore de la mort de madame de Beaumont.

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