lundi 30 mars 2015

On dirait de deux bénédictins

Jusqu'en juillet, je sais que je vais jouir d'un été perpétuel, vêtir mes yeux d'une lumière sensuelle, me taire devant la couleur de Bonnard.
J'ai déterré un petit bout d'ouvrage sur une étagère qui croule sous les pages. C'est une fenêtre qui donne sur des joies modestes.
Matisse et Bonnard ont besoin des mots pour dire une complicité de pinceaux. Ils s'écrivent, presque en cachette, à la dérobée, sans autre théorie qu'un bonheur de coloris. Bonnard prie le destinataire de croire en sa "bonne amitié". Matisse met les points sur les i: "Oui ! Je certifie que Pierre Bonnard est un grand peintre pour aujourd'hui et supérieurement pour l'avenir".
Car à peine mort, le peintre du Cannet était encore moqué par l'illettré d'une revue renommée. Picasso raillait l'indécision de son pinceau.
La somptueuse correspondance des deux artistes est précédée d'une lumineuse épigraphe, griffée Gracq: "...On dirait de deux bénédictins qui se renseignent l'un l'autre avec urbanité sur l'avancement de leurs travaux jumeaux, et s'entraident sans égoïsme et sans petitesse à serrer de plus près la vérité".

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